Ukraine, bilan intermédiaire militaire, 20 mars 2022

Ukraine, bilan intermédiaire militaire, 20 mars 2022

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Ukraine, bilan intermédiaire militaire, 20 mars 2022

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Ukraine, bilan intermédiaire militaire, mai 2022

Ukraine, bilan intermédiaire militaire, septembre 2022

Ukraine, bilan intermédiaire militaire, fin septembre 2022

Ukraine, bilan intermédiaire militaire, octobre-novembre 2022


Ukraine, bilan intermédiaire (stratégique, purement militaire)

(Mon premier vrai point de vue personnel)


Il y a deux points principaux que je constate depuis les premiers jours du conflit, en dehors du front des LDNR, et qui sont exprimés dans mes résumés et commentaires écrits à chaud :

🔸 L'offensive russe ressemble à une blitzkrieg sur de nombreux fronts, avec tout ce que ça implique. En 24/48 heures, la force armée russe :

🔹 Saute sur Gostomel et prend le contrôle du nord-ouest de Kiev par Tchernobyl,

🔹 Fonce sur le nord-est de Kiev par Tchernigov,

🔹 Fonce sur Sumy qu'elle dépasse,

🔹 Fonce sur Kharkov,

🔹 Fonce sur Melitopol,

🔹 Fonce sur Kherson, franchit le Dniepr et se dirige vers Nikolaev.

❗️ Et puis... Tout se fige.

Le mouvement des deux premiers jours correspond à une blitzkrieg incomplète, à une immense infiltration, qui va se poursuivre localement.

Je reprends, en comparant, pour faire passer la sensation :

Nous avons une blitzkrieg générale, similaire au mouvement de la 7ème PD de Rommel les 15-17 mai 1940, durant laquelle tout s'immobiliserait le 17 mai 1940, les unités restant là où elles se trouvent durant plusieurs jours, plusieurs semaines, ne cherchant plus à se déplacer, seules les colonnes de logistique et de soutien circulant sans escorte sérieuse en milieu hostile jusqu'aux éléments avancés. Comme si les éléments avancés avaient atteint l'objectif désigné : se trouver sur des routes, au milieu de "nulle part", en zone hostile.

🔹 Localement, la blitzkrieg se poursuit le 3ème jour en direction d'Energodar. Le front se fige pendant 5 jours, jusqu'au 8ème jour.

🔹 Le jour 8, la blitzgrieg reprend localement en direction de Voznesensk, en une percée de 75 km. Une fois encore, c'est une blitzkrieg incomplète, tout se fige et les colonnes de logistique et de soutien circulent en terrain hostile pendant plusieurs jours, sans escorte appropriée.

Et puis, tout reste ainsi figé, durant plusieurs semaines. Quelques adaptations sont menées, par la force des choses :

👉🏻 Après un acharnement inexpliqué sur Kharkov, où une colonne de véhicules légers Tigr est envoyée en direction du centre-ville à J+4, prise en embuscade, et où des combats urbains ont lieu pendant encore plusieurs jours, les troupes se replient de la ville.

👉🏻 Elaboration d'une ligne de front continue au sud, depuis Energodar et Kherson, jusqu'à la ligne de front de DNR, et nettoyage des arrières.

👉🏻 Repli de Voznesensk,

👉🏻 Sécurisation de toute la rive ouest du Dniepr dans la province de Kherson.

Et tout reste ainsi, nous sommes à J+24... Cet immobilisme après 24/48 heures entraîne l'annihilation complète du bénéfice du principe de blitzkrieg.


Passons au deuxième point principal :

🔸 Faibles moyens engagés, faible intensité des combats, peu d'agressivité des forces russes :

🔹 L'offensive russe engage un faible nombre de troupes (ou bien, lorsqu'un nombre important de troupe est engagé, localement, notamment autour de Kiev, elle ne les utilise pas. les unités sont mises en attente pendant plusieurs semaines),

🔹 Peu de combats sont menés,

🔹 L'intensité des combats est extrêmement faible (sauf très localement : nord-ouest Kiev, Kharkov, Kherson puis Nikolaev/Voznesensk, il n'est ici, bien sûr, pas question des LDNR),

🔹 Les frappes de missile de croisière sont très économiques (cela est seulement très partiellement compensé par leur très grande précision par rapport aux standards OTAN),

🔹 Très peu d'utilisation de moyens contre les radars DCA et les stations de guidage de drones.


➡️ Ceci peut s'expliquer :

🔸 Par un plan A, une volonté d'impressionner l'adversaire durant 48h pour l'inciter à se rendre immédiatement, le laissant imaginer une fin rapide (d'ailleurs, ça a fonctionné sur un observateur Francophone, qui s'est laissé prendre au piège pendant plusieurs semaines, de manière inexpliquée ; j'attends son mea-culpa), et apporter de quoi soutenir un coup d'Etat de l'armée ukrainienne à Kiev en prenant la BA de Gostomel en banlieue nord-ouest de Kiev dès le premier jour, puis en renforçant Gostomel avec 2 divisions sous 48h, via Tchernobyl.

👉🏻 Les offensives russes aux autres endroits du front sur Tchernigov, Sumy, Kharkov, Kherson et Nikolaev peuvent avoir eu pour double-objectif d'éloigner d'hypothétiques combats de la frontière russe et biélorusse et d'y fixer des troupes kiéviennes qui ne pourront ainsi pas renforcer les lignes de front de LDNR où l'offensive la plus sérieuse se produit.

Ainsi, le mouvement sur Energodar suit la même logique, tout en prenant le contrôle facile de la centrale nucléaire, et le mouvement sur Melitopol/Bryansk permettent d'aller aider, facilement et sans grand effort, l'encerclement de Marioupol.

🔸 L'objectif militaire décrit précédemment pourrait former le plan B, se limitant, comme on pouvait le penser la veille des opérations, aux seules LDNR. Le reste n'aurait alors lieu que pour soulager les lignes LDNR et protéger les frontières russes et partiellement biélorusses.

➡️ Cela laisse un grand flou sur l'avenir. L'immobilisme qui s'éternise, à J+24 permet d'imaginer beaucoup de choses.

👉🏻 La ligne de front actuelle, est-elle prévue depuis le début, est-elle le plan B ? Est-elle temporaire pour appuyer les plans A & B, avant un retrait de toutes les troupes vers la Russie ? Cela pourrait se concevoir...

Mais on regrette alors un plan C, plus ambitieux... L'absence de volonté de passer Nikolaev pour prendre Odessa, qui est un objectif logique, car autant pro-Russe que Nikolaev, Melitopol, Kharkov ; et qui permettrait le désenclavement de la Transnistrie ; puis la fragmentation administrative de l'Ukraine, permettant le règlement à long terme du problème politique et idéologique de cette région.

Or, l'absence de volonté, l'absence de troupes suffisantes pour s'orienter vers Odessa, tout en sécurisant le flanc nord (pour éviter une attaque kiévienne contre Voznesensk/Nikolaev/Odessa depuis le centre de l'Ukraine, rive ouest du Dniepr), rend ce plan C moins probable (pour le moment).

👉🏻 Est-il prévu de créer, un jour, un chaudron à Donetsk/Kramatorsk/Severodonetsk ? Si oui, quand ? Et l'achèvement de cet événement, sera-t-il le déclencheur de la reprise des opérations au cœur de l'Ukraine ? Cela peut avoir du sens.

👉🏻 La lenteur, est-elle prévue, volontaire, va-t-on s'orienter vers une nouvelle phase plus tard, après l'accumulation de moyens ?

👉🏻 Le principe des blitzkrieg incomplètes, encore utilisées sur Voznesensk à J+8 et durant plusieurs jours jusqu'au repli du groupe russe, est-il une chose jugée bonne ou mauvaise par le GQG Russe ? Va-t-il continuer cette pratique en cas de reprise de l'offensive ? Justifiera-t-il, expliquera-t-il ce concept un jour, même après le conflit ?


➡️ Le conflit ne suit aucune logique militaire traditionnelle, tant stratégiquement que tactiquement. On ne peut réellement en juger :

👉🏻 Qu'en ayant connaissance des buts de guerre/objectifs militaires et politiques réels de Moscou, que l'on ne connaît pas encore,

👉🏻 Ou bien en obtenant les justifications du GQG russe, mais cela est un secret militaire, peut-être même pour plusieurs décennies.

ℹ️ Est-il utile de suggérer une stratégie et une tactique alternatives... D'abord, il faut connaître les objectifs militaires et politiques principaux et secondaires. On ne les connaît pas. Ensuite, il faut connaître les limites définies politiquement d'une part (on en connaît certaines : on ne peut pas attaquer les infrastructures civiles, c'est militairement extrêmement handicapant ; ne pas engager d'appelés ; faire une opération peu intense/à moindre coût et sans engagement : pouvoir cesser le conflit rapidement) et militairement (il faut conserver des réserves, un groupe en Arménie, en Transnistrie, en Syrie, dans toutes les régions bordées de voisins hostiles : en Biélorussie, à Kaliningrad, sur les Kouriles etc).

👉🏻 Exit les superbes offensives typiques de la Seconde Guerre Mondiale où le nombre de troupes, les moyens engagés et le nombre de munitions tirées étaient peu contingentés. Evidemment, en tant que militariste, la version "rouleau compresseur" aurait eu ma très nette préférence. (Celle-ci a été en vigueur en LDNR durant les premières semaines, avant un ralentissement au fur et à mesure de la progression vers le gros du dispositif ennemi, à l'approche du triangle Donetsk, Kramatorsk, Severodonetsk.)

Il faut faire avec, avoir davantage une position d'observateur, et économiser ses opinions pour plus tard.

ℹ️ Quant à prendre les stratèges russes pour des ânes... C'est en arrivant à cette conclusion, lorsque vous êtes confrontés à un adversaire quelconque, que vous devez immédiatement vous dire que vous êtes passé à côté de quelque chose, et que l'âne, c'est vous. Cela vous permettra de vous remettre en question, et d'éviter de tomber dans des pièges potentiels.


ANNEXES

24 mars 2022

Réponses aux commentaires :

- Sur Nikolaev, le front est figé depuis plus de 2 semaines, comme les cartes le montrent. Il n'y a aucune volonté de pousser plus loin. Le suspens demeurera jusqu'à l'éventuel encerclement de Kramatorsk et la reddition de l'hypothétique chaudron.

Après tout, on peut se demander si la Russie est intéressée à faire un chaudron à Kramatorsk. Si le but est une opération limitée, alors elle pourrait se borner à repousser la ligne de front vers l'ouest, sans encerclement. Cela serait bien dommage, mais conforme avec le peu d'agressivité et de moyens mis en œuvre par les forces russes depuis le 3ème jour des opérations.


- Il n'est pas question de perdre Izyum, il est simplement question d'un groupe de soldats kiéviens qui se trouvent en rive sud de la rivière Seversky Donets, et d'une très puissante force kiévienne sur Kamenka et au-delà, ce qui est logique puisqu'il s'agit de l'arrière de la "citadelle" de Slaviansk/Kramatorsk.

Si j'ai bien compris, des troupes russes se trouvent entre le sud d'Izyum et Kamenka, les kiéviens à Izyum seraient encerclés, coincés contre la rivière. Des forces russes auraient pu franchir la passerelle et/ou poser un pont flottant quelque part pour franchir la rivière.

Mais je ne suis sûr de rien par rapport à ce niveau de détails, car l'armée russe diffuse des fausses informations et les journalistes russes accrédités par l'armée russe pour les accompagner évitent de contredire l'armée. Ils ont déjà suffisamment de courage et prennent suffisamment de liberté pour affirmer que les propos de l'armée russe sont faux et que le contrôle sur le sud d'Izyum est inchangé. Je rappelle qu'ils s'exposent à plusieurs années de prison. Je ne pense pas que le régime français accepterait une telle liberté d'expression parmi ses journalistes accrédités. Je suis même sûr et certain du contraire. Prenez le temps d'y penser.

Personnellement, je pense que les forces russes, à Izyum, ont touché le gros du dispositif ennemi, il n'y aura pas de blitzkrieg à cet endroit, c'est clair depuis le temps.

Il s'agit alors de pression classique. Le vrai mouvement sympathique serait, comme dans les premiers jours, une percée depuis le nord et depuis le sud, sur Pavlograd. Cisailler le pays en deux aurait été le coup stratégique à faire, mais cela nécessite davantage de troupes...


- Pourquoi la (Biélo)Russie n'envoie pas plus de troupes ? Parce qu'elle n'a pas envie d'en faire une opération si importante, l'opération est limitée. On peut même craindre que les objectifs soient très limités. Finalement, comme la Géorgie de 2008 : de grandes opérations limitées en profondeur le temps de dégager l'Ossétie du Sud et l'Abkhazie, puis un retrait des troupes sur les frontières des deux Etats fraîchement reconnus. Remplacez par DNR et LNR, ajoutez peut-être quelques territoires et/ou une zone tampon, et vous avez l'actuel scénario ukrainien limité. Le reste des opérations sur Nikolaev, Kiev, Tchernigov et Sumy n'est là que pour divertir des troupes kiéviennes loin du front, pour éloigner les tensions loin de la frontière russe, et pour assister un éventuel coup d'Etat à Kiev, ce que j'ai déjà expliqué depuis longtemps.

J'aimerais me tromper et voir le scénario d'un chaudron, puis de la reprise des opérations vers l'ouest. Evidemment.


25 mars 2022

A - BILAN OFFICIEL DE L'ARMÉE RUSSE POUR LE 1ER MOIS DE L'OPÉRATION EN UKRAINE

(Et commentaires de ma part)


L'armée affirme avoir terminé la première phase de son opération.

Elle compte poursuivre selon le même procédé : épargner les infrastructures civiles en recourant à des frappes précises (même si cela handicape sérieusement l'armée russe).


Le GQG russe confirme le ressenti que j'avais exprimé à plusieurs reprises (dans l'article ci-dessus et sur Kharkov dès J0 puis sur l'ensemble du front nord dès J+2 et sur l'ensemble du théâtre, incluant le front sud, à J+3) : les attaques en direction de Kherson/Nikolaev, Kiev/Tchernigov/Sumy/Kharkov, ont pour but d'y divertir des troupes ennemies pour qu'elles ne puissent pas renforcer la ligne de front de LDNR, qui est la zone d'opération principale. Rien de plus. Du moins, dans la première phase des opérations, qui vient officiellement de s'achever.


Il me reste à découvrir, pour satisfaire ma curiosité concernant l'opération Zz :

1/ Si un chaudron est prévu pour Kramatorsk ou s'il s'agira simplement de repousser l'ennemi plus loin,

2/ Si les opérations se poursuivront dans le reste de l'Ukraine après la reddition de Kramatorsk (et si elles seront limitées aux régions pro-russes) ou si les troupes russes seront retirées du territoire (et si des territoires tampons seront conservés ou déclarés neutres),

3/ En quoi consiste le volet politique ("dénazification", pro-russification).

Et les dates de ces différentes étapes.

Les autres aspects de l'opération Zz m'intéressent moins, sauf les possibles imprévus que l'ennemi pourrait opposer, histoire d'ajouter un peu de piquant.


Concernant la démilitarisation de Kiev, l'armée russe affirme se trouver à 70 % de la progression dans la destruction des stocks d'armes kiéviens, dont la destruction complète des forces aérienne et navale en tant que structures militaires étatiques.

A cela s'ajoute la destruction de deux tiers des ateliers de réparation de matériels militaires.

Moscou affirme que l'armée kiévienne a déjà engagé toutes ses unités, il n'y a plus de réserves à sa disposition.


Sur la question des statistiques, les forces russes affirment que l'armée kiévienne a perdu :

- 14 mille tués et 16 mille blessés,

- Sur environ 2 500 véhicules blindés, 1 500 destructions,

- Sur environ 150 avions de combat, 110 destructions,

- Pour la flotte d'hélicoptères, la moitié des 150 appareils sont détruits,

- Il reste 1 drone turc TB2 Bayraktar sur les 36 livrés à Kiev,

- Sur 180 systèmes de DCA S-300 et Buk-M1, il en resterait une quarantaine.

- Sur 300 radars de diverse fonctionnalité, moins de la moitié sont déclarés détruits.


Les pertes officielles russes sont :

Environ 1 500 tués et 4 000 blessés.

Les pertes des LDNR ne sont pas incluses dedans (sachant que ce sont elles qui ont mené le plus gros des combats).


https://t.me/boris_rozhin/36349

https://t.me/boris_rozhin/36350

https://t.me/boris_rozhin/36352



B - LE RESSENTI SUR L'OPÉRATION RUSSE est de plus en plus celui d'une opération militaire limitée (c'est ce qui a toujours été annoncé par Moscou) aux objectifs militaires limités.


C'est ce qui explique avec le plus de cohérence ce qu'on voit depuis J+2 (26 février) : manque d'agressivité des troupes russes, peu de combats, peu de personnels engagés dans l'opération, fin de la progression dès le jour 2 (sauf localement au sud) et en LDNR, évidemment, puisque la libération du Donbass est un des objectifs principaux.


A cela, il faut ajouter les négociations (c'est cela qui m'a fait écrire cette publication). Celles-ci incluent la neutralité (pas d'adhésion à l'OTAN), la démilitarisation (non déploiement d'armes offensives, du genre missiles de croisière ou balistiques), la dénazification, la reconnaissance de la Crimée, des LDNR et de la langue russe comme langue officielle en plus de l'ukrainien.

Cela signifie que Moscou est prêt à ne pas se charger elle-même du volet politique/institutionnel, qui présuppose une occupation du territoire, avec de lourdes conséquences à long terme. Des documents juridiques, lois et articles constitutionnels pourraient lui suffire ; avec, pour inciter au respect des règles et à la bonne tenue des procès, la menace d'interventions comme nous le voyons, ou même simplement sur le schéma israélien en Syrie et au Liban (ou comme celui de la force aérienne russe à Idleb en Syrie occupée).


C'est "étonnamment" ce que j'avais écrit J+2 : « cette guerre va être longue et va devoir se transformer en guerre d'occupation, si l'objectif est de dénazifier et de dés-occidentaliser tout ça. La Russie devrait revoir ses ambitions à la baisse et se contenter de démilitariser le pays comme le fait Israël contre la Syrie et le Liban : frappes distantes sans intervention sur le terrain. »


A ce moment là, le 26 février, l'idée populaire était que la Russie était en train d'envahir tout le pays ou presque. En réalité, le plan n'avait jamais été si ambitieux (on ne l'a supposé qu'après) et contrairement à ce que j'avais écrit, le renseignement russe n'avait pas sous-estimé l'hostilité de la population kiévienne. Moscou n'a probablement pas été surprise par quoi que ce soit, la perche tendue, constituée par le plan A, n'a pas fonctionné (ou pas encore ?), le plan B, plan principal, déroulé simultanément, fonctionne.

Que l'OTAN prenne Lvov ou non n'est pas un problème stratégique.


A confirmer par les événements futurs.


Si Kiev n'accepte pas les négociations, l'opération se poursuivra, et je pense aujourd'hui que ça embêterait davantage Moscou, pour les raisons écrites J+2. D'où le fait que Moscou ne se presse pas, pour laisser à Kiev le temps d'accepter les négociations.

En cas de refus de négocier, cela permettrait de dérouler le plan C, qui intéresse moins Moscou, mais qui serait plus solide sur le long terme, avec la partition de l'Ukraine. On aura le temps d'en reparler si on s'engage sur cette voie, en partant sur la base de ce qui a été évoqué le 14 mars, cf. là aussi (copies d'écrans ci-dessous).


Eh bien, aujourd'hui on commence à y voir plus clair en ayant simplifié les hypothèses futures. Toujours avec les plans A, B et C que j'ai exposés le 20 mars, et leurs sous-variantes, essentiellement articulées autour de mes 3 questions posées plus tôt dans la journée, en A - Bilan officiel de l'armée russe pour le 1er mois de l'opération en Ukraine.


30 mars 2022

A - ALORS QUE LES GENS DEMANDENT UNE GUERRE DURE en Ukraine (les occidentalo-kiéviens d’un côté ; et les russes de l’autre) les autorités russes retiennent les ardeurs de leur population.

Conformément à ce que j’ai écrit depuis 10 jours ici même, les autorités russes disent ne pas être intéressées à créer un immense chaudron semblable à Stalingrad, d’après leur propre comparaison.

Cela répond à ma question n° 1 (sur trois) sur un immense chaudron à Kramatorsk : c'était pressenti, il n'y en aura pas. Cela nécessitant d'énormes moyens, que la Russie ne veut pas engager, pour éviter l'escalade très familière au joueur de machines à sous. Mais j’attends confirmation par des actes, je ne tiens jamais compte des déclarations. 

Il y a une 4ème question qui se pose, associée à mes questions n° 2 et 3 (cf. § 25 mars 2022 /A). Si les kiéviens ne négocient jamais et/ou que les bandéristes continuent leurs tirs sur le territoire russe... On se retrouve à devoir occuper tout le pays ? Option redoutée/refusée par les autorités russes. Ou alors, on se retrouve à devoir créer d'immenses zones tampons en entretenant une immense ligne de front, et en poursuivant éternellement les frappes aériennes quotidiennes contre un ennemi constamment approvisionné par l'OTAN qui reste elle-même insensible à la pression économique et aux pénuries ? Option à écarter, c'est trop coûteux. 

Autre chose alors ?

La question n° 4 est celle qui définit la voie de sortie prévue dans la stratégie russe, et je ne l'ai pas déterminée, je n'ai pas encore déterminé de grandes lignes qui seraient cohérentes avec le minimalisme de l'opération russe. C'est bien sûr trop tôt, on verra ça après le nettoyage des LDNR.


B - RYBAR CONFIRME L'IDEE DE TERRITOIRES TAMPONS en Ukraine. Alors que les LDNR seront probablement intégrées à la Russie à terme, d'autres territoires devraient rester indépendants/non reconnus/neutres et servir pour protéger les régions russes.

https://t.me/rybar/30087

Très bien, nous en parlons depuis un certain temps, selon ce que j'ai nommé "plan B" (et correspondant à ma question n° 2), ces territoires pourraient correspondre à ceux déjà contrôlés, voire, soyons optimistes, inclure Odessa pour désenclaver la Transnistrie (mon "plan C"), mais qu'en est-il de ma question n° 4 : comment protéger ces zones tampons sans s'engager dans une guerre éternelle, sur le schéma israélien en Syrie et au Liban, qui sera coûteuse à la Russie, vu la longueur de la ligne de front et l'approvisionnement des kiéviens par l'OTAN ?


31 mars - 01 avril 2022

Que dire de ce retrait des troupes russes de Kiev ?

https://t.me/rybar/30199


« Si l'opération à venir sur la rive gauche/Est se termine par la défaite des forces armées ukrainiennes, alors tout le monde parlera du plan bien pensé de l'état-major général.

En effet, selon les déclarations officielles, l'incursion près de Kiev était nécessaire pour immobiliser les forces ennemies lors de la première étape, et l'assaut sur Kiev n'était pas prévu.


[Ce qui précède semblait évident depuis un bon moment...]


Maintenant, ils ont officiellement annoncé que l'objectif de la 2ème phase de l'opération est de vaincre les principales forces des Forces armées ukrainiennes dans le Donbass.

Eh bien, si celles-ci sont vaincues, que les LDNR sont entièrement libérées, alors tout ressemblera effectivement au déroulement du plan que le GQG a donné.

Mais en cas d'échec, il ne sera guère possible de dire que tout se déroule comme prévu.

Il reste donc à attendre le début de l'opération et à se pencher sur la mise en œuvre des objectifs qui ont été définis par l'état-major général.

Je crois que nous aurons des réponses à toutes les questions au cours du mois. »


➡️ 👍 Il sera difficile d'avancer que cette communication du GQG russe était destinée à tromper l'ennemi et que l'objectif réel de cette étape est différent, car il faut aussi donner à manger au public russe, lui apporter un succès clair.

La propagande occidentalo-kiévienne pense, et je pense que c'est une bonne idée, que le gouvernement russe veut libérer les LDNR de la présence kiévienne/bandériste avant le 9 mai, et organiser un super événement sur la libération du nazisme etc. Il faut s'attendre à "la guerre est finie, on a gagné, machin bidule truc", comme cela a été fait à Hmeimim en Syrie en décembre 2017, quelques semaines avant que la base ne soit attaquée au mortier par des terroristes.

Et puis, ensuite, on entrera dans la phase 3 :

- Soit la fin du conflit (LDNR libérées, mission accomplie, retrait des troupes etc, sur le schéma de la Géorgie en 2008),

- Soit le maintien de troupes dans certaines provinces qui demeureront des zones tampons (Kherson et autres),

- Soit la reprise des offensives dans les zones pro-russes, avec ce désenclavement de la Transnistrie dont, s'il n'est pas fait, vous entendrez parler sur ma chaîne pendant des années en tant que reproche, je ne lâcherai pas ! (Odessa, et plus ou moins Nikopol, Zaporozhye, Dniepropetrovsk etc... Voire ligne Kharkov - Chisinau suivant l'autoroute E584/M103 qui "donne un accès rapide aux Balkans pour la Russie", objectif évoqué dans une copie d'écran ci-dessus, du 14 mars à 20h12).

- Ou une offensive plus large encore, incluant les zones frontalières, donc tout le nord avec Sumy-Tchernigov.

- Jusqu'à ce que Kiev accepte de négocier, sachant qu'à ce point-ci, il ne reste plus que l'ouest ukrainien, pro-occidental.


La vraie stratégie serait, je le répète, de transformer le front de l'Est en un chaudron sur Pavlograd, pour neutraliser l'essentiel de l'armée kiévienne. Dans le cas contraire, en se contentant de la repousser et en lui laissant toute sa capacité militaire (matérielle), il n'y a pas d'intérêt stratégique, il faudra toujours la combattre...

Mais si l'opération russe reste limitée, le chaudron me semble compromis.


D'un autre côté, cette communication ostensible sur le retrait de troupes à Kiev en faveur du Donbass... Peut conduire à une réaction symétrique de l'ennemi. Et alors, n'oublions pas que Colonel Cassad pressentait hier la reprise de l'offensive Kherson - Nikolaev et/ou Kherson - Nikopol/Krivoy Rog : cela permettrait d'y divertir des troupes kiéviennes, tout en poursuivant la conquête du territoire.


Le mois d'avril sera intéressant !


02 avril 2022

La logique voudrait que Tchernigov, Sumy et Kharkov restent sous contrôle russe jusqu'à la fin du conflit au moins, pour servir de zone frontalière tampon, divertir les troupes kiéviennes, et se laisser des options pour attaquer le pays plus à l'ouest, en profondeur. Un axe Sumy - Poltava permettrait, si le GQG russe en a l'intention, d'isoler plus largement l'Est du pays.

Par rapport à Sumy / Poltava, l'armée russe, qui dit ne pas vouloir s'engager dans une opération de grande envergure en Ukraine, pourrait nous refaire le coup de Kiev, en plus local : mener une fausse offensive sur Poltava pour malmener les arrières de l'ennemi, sans chercher à faire de chaudron ou à couper le pays en deux, tout en menant son offensive principale par Izyum ou ailleurs.

Nous sommes en plein brouillard de guerre avec plein d'options.

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