Une soirée privée avec des jeunes filles riches

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vendredi, 19 août, 2022
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À La Une Société Quand des filles de bonnes familles s’adonnent à la prostitution de luxe

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Une tendance mondiale qui touche aussi le Maroc. Elles sont bien instruites, ont une bonne carrière professionnelle mais veulent s’offrir une vie au-dessus de leurs moyens. Les clients paient le prix fort : de 50000 à 100 000 DH la semaine en plus des cadeaux.
Le monde de la prostitution n’est plus alimenté que par la précarité et la pauvreté. Il attire de plus en plus de filles à l’abri du besoin qui, par goût du luxe, l’intègrent par choix. Appelées «prostituées de sacs de marques», elles ont grandi dans un milieu aisé ou relativement aisé, fait des études supérieures et même réussi dans leur vie professionnelle. Et pourtant, elles ont choisi de faire de leurs corps un commerce. «Cette nouvelle tendance n’est pas propre au Maroc, c’est un phénomène mondial. En Chine, au Japon ou encore aux Etats-Unis, il y a de plus en plus de filles de familles de la classe moyenne ou même riches qui pratiquent la prostitution», explique Aboubakr Harakat, psychologue et sexologue. Selon lui, «la société de consommation crée de plus en plus une frustration chez les jeunes. Cette frustration s’est accentuée avec les médias et réseaux sociaux. Les filles veulent porter des vêtements de grandes marques, avoir une voiture de luxe et passer des vacances de rêves. Or, elles sont conscientes que ni les études ni le travail ne leur permettront d’avoir cette vie».
En effet, même après un parcours scolaire brillant, ces filles démarrent leur vie professionnelle avec un salaire qui ne dépasse pas les 9 000 DH. Un revenu qui ne leur permet pas de vivre dans le niveau qu’elles espèrent. Par conséquent, elles sont nombreuses à choisir cette voie, et dans la plupart des cas elles ne sont pas vraiment conscientes qu’elles font dans la prostitution. «Cette prostitution de luxe est encouragée par l’avènement d’une nouvelle clientèle prête à payer le prix fort pour être accompagnée d’une belle femme, classe et cultivée, qui n’a rien d’une prostituée classique», développe M. Harakat. Un avis partagé par Hayfa, un proxénète (et maquereau) de 30 ans, connu dans ce milieu. «Les exigences des clients ont beaucoup changé ces dernières années. Ils n’en veulent plus des prostituées qui passent leur temps à se plaindre de leur vie misérable et raconter l’histoire de leur père malade ou de leur frère en prison. Les clients fortunés veulent aujourd’hui des filles instruites, de bonnes familles et qui parlent plusieurs langues. Des filles qu’ils peuvent présenter à leurs amis et afficher dans les endroits publics sans être gêné», explique-t-il. Selon lui, ces prostituées sont souvent recrutées pour des durées allant d’une semaine à un mois. Elles peuvent travailler au Maroc comme à l’étranger, leur statut socioprofessionnel leur facilitant l’obtention de visas.
Leur mission ne se limite pas à l’aspect sexuel…
«Durant ces séjours, leur mission ne se limite pas à l’aspect sexuel. Elles doivent être marrantes, savoir tenir une conversation, faire le guide et le traducteur», déclare Hayfa. Ce dernier avoue que les filles avec lesquelles il travaille sont choisies selon plusieurs critères, à savoir le physique, la culture générale mais surtout leur statut professionnel et celui de leurs parents. «En travaillant avec des filles de familles pauvres, on s’attend toujours à voir le père, le frère ou la mère venir faire un scandale au client pour demander davantage d’argent. Ces filles peuvent escroquer les clients et créer des problèmes. Ce qui n’est pas le cas avec les filles de bonnes familles qui veulent faire leur travail dans la discrétion et sans soucis», raconte-t-il. Selon lui, ces filles sont dans la plupart des cas des étudiantes dans des universités et grandes écoles au Maroc ou à l’étranger, des cadres ou même des mannequins et actrices connues. Elles sont recrutées soit à travers le bouche-à-oreille ou via les réseaux sociaux. «Quand quelqu’un me présente une nouvelle fille, je me prends avec elle en photo et je la publie sur les réseaux sociaux, principalement Snapchat. Quelques minutes plus tard, et en fonction des retours de mes clients je prends la décision de la recruter ou pas», explique le maquereau.
Qui sont ces filles ? D’où viennent-elles ? Et pourquoi elles ont fait le choix de faire de leurs corps un commerce ?
Chaimae a 22 ans, elle est étudiante en 2e année à l’Oxford College à Londres. «Depuis toute petite, ma mère me répétait tout le temps que je suis belle et que je dois profiter de ces faveurs divines pour changer ma vie et celle de ma famille. J’ai toujours gardé ses conseils en tête et j’en ai fait un objectif», raconte-t-elle. Et d’ajouter : «Au lycée, j’envisageais déjà vendre ma virginité. A ma 1ère année d’études supérieures au Maroc, j’ai rencontré Fati, une prostituée professionnelle qui a commencé sa carrière à 16 ans. Elle m’a mis en contact avec une mère maquerelle très réputée de la place. Après un entretien et une séance photos, elle m’a promis de me trouver un acheteur. Trois semaines plus tard, elle m’a convié à un casting dans un hôtel. Sur place, il y avait une dizaine de filles qui voulaient aussi vendre leur virginité à un riche homme d’affaires du Moyen-Orient». Ce jour-là, Chaimae a réussi en 10 min d’entretien à convaincre ce client. Mais l’affaire n’était pas encore conclue. La jeune fille devait faire un bilan de santé et accepter les conditions du client. Etant très pieux, ce dernier a exigé un mariage avec un contrat «Orfi» pour une durée d’un mois moyennant une somme de 1 million de DH, commission de la proxénète incluse (30%). «Ma mère m’a encouragée à accepter le deal. Elle espérait que ce client me garde pour épouse. Ce qui ne fut pas le cas puisque après la fin de mon séjour, je ne l’ai plus revu et il ne m’a même pas répudiée», regrette-t-elle avant d’ajouter qu’en plus de l’argent et des cadeaux, cette expérience lui a permis d’intégrer ce milieu de la prostitution de luxe par la grande porte. Aujourd’hui, cela fait 2 ans que Chaimae est installée à Londres pour poursuivre ses études supérieures. Selon elle, le choix de ce pays n’est pas anodin. «A Londres, il y a une importante clientèle des pays du Moyen-Orient qui paie le prix fort pour avoir une escort girl marocaine. Les honoraires sont plus intéressants, ils peuvent atteindre 1 500 Livres la soirée (20 000 DH). Désormais, je passe 9 mois à Londres, l’été je rentre au pays car pendant cette période les bonnes affaires ne manquent pas». Pour pouvoir travailler au Maroc, la jeune entretient de bonnes relations avec les proxénètes et autres prostituées de luxe. Elle les appelle de temps à autre et leur envoie même des cadeaux. «C’est important de garder contact avec elles. Car quand des soirées privées sont organisées, ce sont les maquerelles qui recrutent les filles. Il faut toujours faire en sorte de figurer sur leurs listes», précise-t-elle. Et le jeu en vaut la chandelle: lors de ces soirées organisées à Tanger, Rabat, Casablanca et Marrakech, les clients sont très généreux. «Les filles qui assistent à ces évènements touchent une somme de 1 000 euros (dont 30% sont versés à la proxénète) par soirée. Si une fille parvient à séduire un client, la somme est multipliée par deux. Les plus chanceuses peuvent gagner jusqu’à 7 000 euros quand il s’agit d’un client très riche».
Certaines filles le voient plus comme un «échange de services»…
Si Chaimae a choisi volontairement sa voie, d’autres ont intégré ce domaine par pur hasard. C’est le cas de Sofia, une Casablancaise de 34 ans, propriétaire d’un salon de beauté et spa au Maârif. «Après avoir eu un master en gestion hôtelière en 2004, mon beau-frère qui travaillait à l’époque dans une banque au Moyen-Orient m’a proposé de venir passer un stage dans un établissement hôtelier classé. Durant ma période de stage en tant que réceptionniste, de nombreux clients m’ont fait des avances, mais un seul a réussi à attirer mon attention. Cet homme, un quinquagénaire, occupait à l’époque un poste officiel important. Après plusieurs rencontres, il m’a proposé de passer une nuit avec lui, je lui ai expliqué alors que je ne peux pas puisque je suis toujours vierge. A ce moment-là et sans hésitation, il m’a proposé la somme de 4 millions de DH pour avoir cette faveur. Un deal que je n’ai pas pu décliner», raconte-t-elle. A son retour au Maroc, Sofia a acheté un appartement, une voiture de luxe et elle a monté son affaire. Bien qu’elle ait assuré son avenir, elle a fait toutefois le choix de devenir une prostituée professionnelle de luxe. «Grâce à mon apparence, mon bagage et mon réseau, j’ai eu beaucoup de facilité à attirer les clients. Je n’ai pas besoin d’aller dans un bar ou demander le soutien d’une pro ; je travaille grâce à mes copines, les réseaux sociaux et même mes clients qui passent mon numéro à leurs amis qui sont à la recherche d’une escort girl». Sofia ne travaille pas au Maroc. «Mes clients sont tous des étrangers. Généralement, je pars pour des séjours en Europe principalement Paris, Londres et Genève. Le client prend en charge tous les frais de séjour et on négocie des honoraires forfaitaires qui varient en fonction de la durée. Pour une semaine, je peux avoir entre 50 000 DH et 100 000 DH en plus des cadeaux», avance-t-elle.
Cependant, si certaines filles assument leur métier de prostituées de luxe, d’autres refusent cette appellation. Pour elles, il ne s’agit pas de prostitution. «La prostitution c’est chercher des clients dans les lieux publics ou via des proxénètes. Or, ce que nous faisons c’est plutôt un échange de services. Personnellement, je n’ai jamais considéré ce que je fais comme de la prostitution», développe Kenza, 36 ans, directrice marketing dans une multinationale de la place. «Après deux ans de classes préparatoires HEC, j’ai intégré une école de commerce à Paris. Les frais des études étant élevés, je n’ai pas pu garder le même niveau de vie qu’avant. Un jour, après avoir raconté ma situation à une amie, elle m’a proposé de l’accompagner à un cabaret de la ville. J’ai accepté mais je n’étais pas convaincue de l’idée d’aller chercher un homme riche pour m’entretenir et prendre en charge mes dépenses». Et d’ajouter : «Durant la soirée, j’ai vu une quarantaine de filles presque toutes de nationalité marocaine qui faisaient le show dans l’espoir d’attirer l’attention d’un client. Faute d’expérience, je n’ai pas pu entrer en compétition. Je suis restée coincée sur mon fauteuil. A 3h du matin, un homme est venu m’exprimer son admiration et est reparti. Il avait 68 ans. Quelques minutes plus tard, un serveur est venu me voir, m’a remis un papier sur lequel était noté le numéro de l’homme en question, et m’a murmuré que l’addition était réglée. Le lendemain, je l’ai appelé pour le remercier. A son tour, il m’a invitée à dîner. Durant trois mois, je le voyais presque tous les jours, et à la fin de chaque soirée il me donnait entre 200 et 400 euros en fonction de son humeur. Il ne m’a jamais demandé quoi que ce soit. A mon retour au pays, j’ai senti un réel besoin financier. J’ai donc décidé de chercher un nouvel amant». Durant ses trois années d’études, Kenza est sortie avec beaucoup d’hommes. A son retour au Maroc, elle voulait rompre avec son ancienne vie. «C’était un défi difficile à relever. Mon premier salaire était à peine de 8000 DH. Difficile de s’en sortir avec ce petit montant. Ainsi, j’ai continué à profiter des occasions pour me faire un peu d’argent. Aujourd’hui, je travaille les week-ends et les vacances. Généralement je pars à Tanger, Marrakech ou à Saint-Tropez», conclut-elle.
La pratique de la prostitution est condamnée par les mœurs, abhorrée par la religion et interdite par la loi. La prostituée et le client sont punis selon les dispositions de l’article 490 du code pénal, qui stipule que «toute relation sexuelle extraconjugale entre un homme et une femme est considérée comme prostitution et punie d’une peine d’emprisonnement ferme allant d’un mois à un an».


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