Une fantastique orgie à ne pas perdre
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(L'auteur, secrétaire général de mairie de sa profession, fut durant plusieurs saisons invité permanent aux Estivales des Taillades dans le Vaucluse, en tant que photographe (amateur). Ceci se passait dans le théâtre naturel des Anciennes Carrières dédié essentiellement aux concerts de musique classique. Remontons aux environs de l'an 2000 et suivons les sentiments de l'intéressé). Je suis né il y a plus d'un demi-siècle dans une Colonie Française. J'y ai passé mes vingt premières années. Très tôt, vers l'âge de quatre ans, j'ai découvert celle qui sut me charmer et m'accompagne encore : la musique. Mon père me permit de faire sa connaissance sur le phonographe familial (un Stradivox habillé par les luthiers Laberte et Magnié). En dehors de quelques 78 tours de variétés, il possédait un unique disque de musique classique, la Danse Macabre de Camille Saint-Saëns, dont les sept minutes occupaient les deux faces de l'enregistrement ! Saint-"Saëns" captiva l'un des miens : l'ouïe. Je ne me lassais pas d'écouter son historiette musicale, comédie loufoque sur décor de cimetière. Mon père commentait en suivant les soubresauts de l'orchestre tantôt guilleret, tantôt inquiétant. La vie culturelle dans ces horizons ensoleillés était à l'époque assez pauvre, comparée à celle de la Métropole. Là-bas jamais de concert symphonique. J'enviais, adolescent, la France et ses Jeunesses Musicales. Grâce aux microsillons (on ne parlait pas de vinyles à ce moment-là), je rencontrai le grand Beethoven en lutte contre le Destin, en quête d'une humanité, le seul compositeur dont la musique respire. J'entends par "respire" le fait que sa musique oblige l'orchestre à retenir son souffle dans de longues et amples introductions, puis à expirer sous l'expression violente et explosive du thème principal. Je rencontrai aussi Tchaïkovski en proie à son fatum, Ravel sombre dramaturge derrière lequel transparaît l'enfant qu'il était resté, que nous sommes restés, l'insouciant Mendelssohn d'une éternelle jeunesse, Debussy impressionnant d'impressionnisme, sensuel et mystérieux... En m'attardant sur les pochettes grand format des disques (Dieu, que les minuscules CD d'aujourd'hui sont tristes !), je me délectais des photos des exécutants, solistes, chefs d'orchestre, splendides de concentration, gestuellement majestueux. Je ne sais ce que j'aurais payé pour les approcher, les voir en chair et en os, et surtout m'enivrer de musique dans une salle de concert, me perdre dans une orgie d'harmonie. Aujourd'hui aux Taillades, ce rêve se réalise. Tout est là : le théâtre naturel des Carrières, plus performant qu'un auditorium, les artistes, dignes successeurs de ceux dont les photos m'ont fait rêver et... la musique. Dans l'ombre je communie avec elle. A l'aide de ma petite boîte noire, je fige respectueusement ces instants d'éternité, je rends hommage aux interprètes, et je livre au public mes témoignages de jours heureux... (copyright Jean-Michel Cagnon 2001).
J'aime la belle musique, remarquablement interprétée, quelle qu'en soit la forme, instrument solo, petite formation (jazz New-Orleans, musiques diverses d'inspiration sud-américaine), chorale, chanson à thème, avec toutefois une préférence pour le grand orchestre symphonique. Si vous prêtez attention à l'auditoire, vous remarquerez parfois l'immobilité des visages tendus en une même ferveur, une intense communion. Cette harmonie qui chatoie dans nos oreilles, c'est en quelque sorte un "Espéranto" pour nos âmes. Et le paradoxe, c'est que ce langage universel peut résonner différemment en chacun d'entre nous : un tel sera sensible à la texture de la mélodie, tel autre s'attachera à la virtuosité de l'exécutant; pour un troisième l'interprétation de l’œuvre éveillera une nostalgie tandis qu'un quatrième y trouvera réconfort et stimulant. Mais dans l'ensemble nous sommes naturellement touchés par l'esthétique, malgré les réactions diverses qu'elle peut engendrer selon notre tempérament et notre acquis. Je ne connais pas le solfège et je perçois donc la musique instinctivement. Il s'agit d'une sensation "brut de décoffrage" si j'ose m'exprimer ainsi, en parfaite résonance d'une quête émotionnelle et esthétique. Je ne sais par conséquent jouer d'aucun instrument mais j'ai toujours été fasciné par la beauté de leur forme : le déhanchement d'un violon, l'enroulement spiralé d'un cor, la joliesse ordonnée d'un clavier. Il y a là une symbiose des harmonies visuelle et auditive. Aussi par le truchement de l'appareil photo, seul et modeste instrument que je sache manier, je tente à ma façon de traduire le beau et de rejoindre les prestigieux artistes sur scène. Le croirez-vous? durant le furtif instant où l'image impressionne à la fois mon œil collé au viseur et la pellicule, je pense que je suis heureux. (copyright Jean-Michel Cagnon 2001).
Date de dernière mise à jour : 02/07/2021
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Camille Bigot -
franceinfo Culture
France Télévisions
Rédaction Culture
Publié le 23/08/2022 16:24
Mis à jour le 23/08/2022 16:41
Marieke Lucas Rijneveld, aut
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