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« Par dessus les distances qui se rétrécissent, les idéologies qui s’atténuent, les politiques qui s’essoufflent, et à moins que l’humanité s’anéantisse elle-même un jour dans de monstrueuses destructions, le fait qui dominera le futur, c’est l’unité de notre univers. Une cause, celle de l’homme ; une nécessité, celle du progrès mondial et, par conséquent, de l’aide à tous les pays qui le souhaitent pour leur développement ; un destin, celui de la paix, sont, pour notre espèce, les conditions mêmes de sa vie. » (Discours de Charles de Gaulle à l’Université de Mexico, le 18 mars 1964)
Paris, le 22 juin 2022 — Ne mâchons pas les mots. Face au dévoiement de la doctrine de l’OTAN que va consacrer le sommet de Madrid des 28, 29 et 30 juin, la France doit se retirer de son commandement intégré. Au nom des intérêts fondamentaux de la nation et de la paix dans le monde.
En effet, lors de sa Conférence de presse tenue le 16 juin 2022, Jens Stoltenberg, le Secrétaire général de l’Alliance, n’a pas caché son dessein. La participation du président ukrainien Zelensky, dont il se réjouit, consacre la volonté assumée des pays membres d’obtenir la victoire contre la Russie. De fait, l’Ukraine se trouve ainsi associée à l’OTAN, ce qui revient à franchir une ligne rouge vis-à-vis de Moscou. La France ne peut l’ignorer, puisque M. Stoltenberg se trouvait hier à Paris et qu’Emmanuel Macron s’est rendu à Kiev pour se joindre à cet engagement. Or les forces militaires ukrainiennes sont proches d’une défaite sur le terrain. Que peut donc faire l’OTAN dans ces circonstances ? Dans sa logique, devenir clairement un cobelligérant. En intensifiant sa participation à la guerre, soit dans son contexte cybernétique, soit au risque de franchir le seuil du recours à des armes nucléaires tactiques que possède également la Russie.
Dans ce contexte, Jens Stoltenberg est allé encore plus loin :
Nous allons également décider d’un nouveau concept stratégique pour l’OTAN, en arrêtant notre position sur la Russie, sur les nouveaux défis et, pour la première fois, sur la Chine .
C’est ce qui est qualifié dans le jargon de l’organisation de « Global NATO » , et qui signifie l’extension agressive de la compétence de l’OTAN aux affaires du monde entier. Déjà l’OTAN avait perdu sa raison d’être lors de la dissolution du Pacte de Varsovie, mais ici, il s’agit bien davantage d’une extension insensée des rives de l’Atlantique jusqu’à celles du Pacifique.
Accepter ce contexte reviendrait à aliéner notre indépendance nationale et à entreprendre une guerre permanente dans le monde, pouvant dégénérer, par accident ou par une folle fuite en avant, en conflit nucléaire, au risque « que l’humanité s’anéantisse elle-même dans de monstrueuses destructions. » Que les médias et l’irresponsabilité de nos dirigeants tentent de nous plonger dans un déni de réalité ne change rien à la réalité.
Prétendre changer l’Alliance de l’intérieur est désormais une vue de l’esprit. C’est pourquoi la seule option raisonnable est de descendre de ce train fou . Or il existe dans notre pays une majorité pour le vouloir. Environ les deux tiers des Françaises et des Français ont voté pour des candidats qui ont manifesté cet engagement. J’appelle ces candidats, avec l’urgence qu’exige la situation actuelle dans le monde, à tenir leurs promesses et mener la bataille. Ne pas le faire conduirait à la soumission, au déshonneur et en fin de compte à la guerre.
Il faut ajouter que l’article 42 du Traité sur l’Union européenne (UE) , par sa clause de défense mutuelle , lie, de fait sinon de droit, l’UE à l’OTAN. Qui plus est, par la déclaration commune du 10 juillet 2018, le président du Conseil européen, le président de la Commission européenne et le Secrétaire général de l’Otan sont convenus « de renforcer la coopération entre l’UE et l’OTAN (…) sa qualité, son étendue et son intensité. »
Les signataires encouragent « la participation la plus large possible de États membres de l’UE qui ne font pas partie de l’Alliance aux initiatives de celle-ci. » Il est donc clair, dans ces conditions, que la promesse d’une procédure accélérée d’intégration de l’Ukraine à l’UE est, pour la Russie, de même nature que son adhésion à l’OTAN.
Disons-le donc une fois de plus sans mâcher les mots. Ce qui est visé à Madrid, c’est de transformer l’UE en alliance militaire engagée dans une culture de la guerre , au risque d’embraser l’Europe et le monde. C’est une raison encore plus déterminante de dire non.
Un front du refus doit ainsi être constitué. Je constate en particulier que les députés Insoumis avaient déposé une proposition de résolution, le 6 décembre 2021, invitant le gouvernement à retirer la France de l’OTAN. Je constate également de nombreuses déclarations de responsables du RN allant dans le même sens. C’est donc à un mouvement de pression populaire que j’appelle.
Comme on me reprochera justement que le refus de la guerre ne suffit pas à garantir la paix et qu’il faut donc en créer les conditions concrètes, j’ajoute ici les engagements suivants.
Tout d’abord, arrêter de traiter hypocritement le peuple ukrainien comme de la chair à canon. Pour cela, imposer autant que possible une approche diplomatique reconnaissant la neutralité de l’Ukraine, suivant le modèle autrichien, et la garantie de ses frontières, le rattachement de la Crimée à la Russie étant par ailleurs un fait établi et le statut du Donbass restant matière à négociation.
Cependant, cela ne suffit pas. Une solution durable exige la prise en considération des demandes russes formulées en décembre 2021 pour que soit établi un système de stabilité et de sécurité en Europe, excluant formellement la présence d’armes nucléaires offensives de l’OTAN dans des pays autres que l’Allemagne, et de ses installations permanentes dans des pays autres que la Pologne et la Roumanie. Dans le contexte bien évidemment de la garantie des frontières de tous par toutes les parties et l’engagement immédiat de négociations de désarmement.
Mais cela ne suffit toujours pas. Aller au fond des choses exige de mettre fin à l’ordre financier international actuel, porteur de sa propre destruction, et de lui substituer, par des négociations également immédiates, un système de développement économique mutuel gagnant-gagnant, suivant les orientations définies par les participants aux conférences internationales de l’Institut Schiller. La paix exige d’élever chaque être humain à la dignité d’homme en offrant à chaque nation les moyens de son développement, comme l’ont voulu chacun à leur façon et en leur temps Roosevelt, de Gaulle et Chou en Lai.
La paix est ainsi à la fois nécessaire à l’avenir du monde et difficile. Elle ne peut être assurée qu’à un niveau supérieur de relations entre les peuples, permettant de faire coïncider des intérêts opposés à des niveaux inférieurs. Notre chef d’état-major des Armées, s’adressant à nos officiers généraux, estime qu’ « à moyen terme, l’une des conséquences de cette guerre sera sans doute une profonde restructuration des relations économiques mondiales. »
Si je lance cet appel, c’est parce que je suis convaincu que, pour le meilleur, cette tâche est à la mesure de mon pays. La France n’aura de sens que si elle redevient un peuple à destin, et non plus un pays rallié à une dictature financière destructrice et à la culture de la guerre qui en est l’expression. Faisons en sorte qu’elle tienne son rang.
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Jeune Afrique - Par Béchir Ben Yahmed
Mis à jour le
15 décembre 2003 à 00:00
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Nul ne sait si la Turquie sera un jour admise au sein de l’Union européenne, mais celle-ci lui a déjà rendu un inestimable service : elle lui a demandé de procéder à une grande toilette de ses dispositions constitutionnelles et législatives, ainsi que de ses pratiques judiciaires, pour les laver de ce qui sépare encore la Turquie d’un État démocratique. Les Européens ont fait de cette exigence la condition nécessaire, et peut-être pas suffisante, de l’acceptation de la candidature turque.
Pays musulman de 70 millions d’habitants situé aux confins de l’Europe, la Turquie moderne a été dotée, au début du XXe siècle, par son leader de l’époque, Mustapha Kemal, dit Atatürk, d’une Constitution laïque. Mais, jusqu’à la fin de 2002, les militaires y ont dominé la vie politique ; les minorités et les femmes n’étaient pas adéquatement protégées contre les abus et, en un mot comme en mille, le pays n’était pas encore une authentique démocratie. Fin 2003, il ne l’est toujours pas, car le passage à la démocratie est un mouvement qui prend des années, pas une ligne qu’on franchit en une journée. Mais, gouvernée depuis un an par un parti constitué d’ex-islamistes convertis à la démocratie, la Turquie a confirmé sa volonté d’entrer dans l’Union européenne et a accepté de donner les gages que les Européens lui demandaient. Au cours des douze mois écoulés, ses législateurs ont fait le ménage. La tâche, timidement commencée par leurs prédécesseurs, n’est pas encore tout à fait achevée, mais ce qui a été accompli est considérable : une révolution constitutionnelle et juridique. Jugez-en : – la minorité kurde – 10 millions de personnes ! -, opprimée et réprimée pendant des décennies, s’est vu reconnaître par la Constitution la plupart des droits que ses militants réclamaient, au prix de leur liberté et, parfois, de leur vie. La langue kurde acquiert droit de cité, avec journaux, radios et présence à la t
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