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Coincée entre son mari et un voisin entreprenant plutôt sympa, Sophie a vécu, à dix mille mètres d’altitude, une nuit agitée.
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Séduction et turbulences de l’avion ne font qu’un dans cette promiscuité amoureuse… Au retour d'un voyage à Hanoï avec son mari, Sophie tombe sous le charme de son voisin de rangée.
"Un voyage magnifique... Hanoï et la baie d'Along. Ho Chi Minh-Ville et son quartier chinois. Et puis les gens pleins de vie. Beaucoup de bruit, une ville grouillante. Nous nous sommes bien amusés. C'est avec beaucoup de tristesse et à reculons qu'avec mon mari nous montons dans l'avion du retour. En plus, il fait une chaleur dans cet avion... Alors, un voyage de dix heures, coincée entre mon mari, à droite, assis comme d'habitude au bord du couloir pour allonger ses jambes, et, à ma gauche, un autre costaud côté hublot.
J'échange quelques paroles avec mon voisin
Deux heures après, les plateaux-repas. J'échange quelques paroles avec mon voisin. Il me demande d'où je viens, ce que nous avons fait. Lui, il voyage pour son travail. Il a juste fait l'aller-retour. Puis les lumières s'éteignent, il ne reste que les petites veilleuses, et tout l'avion s'assoupit. Le silence se fait. Je ne peux pas vivre sans musique, donc je mets les écouteurs.
Mon mari s'endort partout, ah partout ! Moi, j'ai la chance d'être menue, j'essaie de trouver ma place, dans cet espace restreint où ils débordent tous les deux : je suis privée d'accoudoirs, les mains sur les genoux, réduite à la portion congrue. Là, je m'endors. Pour récupérer un peu. Pendant dix jours, nous n'avons pas arrêté. Je m'écroule. Et fatalement, je penche vers la gauche, c'est mon habitude. Au lit, je dors à droite. Je suis un peu frileuse et je me retourne toujours sur la gauche pour attraper mon mari et me réchauffer. C'est une grosse bouillotte.
Donc je m'affale sur l'épaule de l'inconnu . J'ignore combien de temps. En tout cas, il ne bouge pas. Cela ne doit pas être très agréable pour lui. C'est lourd, une tête. Quand je dors, j'aime bien me cramponner. Je lui attrape le bras. Là, mon mari m'envoie un coup de coude dans les côtes. Je me réveille en sursaut. Il me dit : « Tiens-toi. » Je m'aperçois de mon erreur d'épaule, je me confonds en excuses. Mon voisin a un grand sourire et me dit : « Si mon épaule est confortable, je n'y vois pas d'inconvénient. » Vous pensez bien que je me suis repositionnée au milieu. Mon mari s'est déjà rendormi, mais moi, je n'y arrive plus. Je ne suis pas bien. Furieuse de la remarque de mon mari. En plus, j'ai mal au cou. J'allonge mes jambes loin de moi pour changer de position. Ça fait quand même trois heures que nous sommes assis, je suis ankylosée.
Là, ma jambe rencontre celle de mon voisin. Je me décale un peu. Sa jambe suit. Bon, il a été gentil, souriant, je ne veux pas... Je ne me dégage pas. Nous restons collés l'un à l'autre, avec, comment dire, des petites pressions, avec son genou, avec son pied, délicatement. Il a peur de mes réactions, peut-être. Et puis il y a mon mari de l'autre côté, il a vu qu'il n'était pas commode. C'est drôle : il semble impassible, il ne bouge pas la tête. Comme je n'ai pas d'accoudoir, forcément, j'ai ma main en bas, le bras le long du corps. Il quitte l'accoudoir, il vient sous le siège et il rencontre ma main. Ses doigts restent le long des miens, mais il n'ose pas trop s'aventurer à prendre ma main. Nous sommes comme deux collégiens. Je l'entends bien respirer, quand même, et soupirer.
Ce n'est pas désagréable, ces petits frottements. Je crois que j'y prends plaisir autant que lui, peut-être. On passe par plein de sentiments : c'est émouvant, et il y a des moments où j'ai envie de rire. Il ne doit pas se sentir bien, il doit souffrir. Il y a des choses qui ne vous échappent pas, quand même : il se soulève de son siège, je le sens dans un inconfort... Comment dire sans être triviale ? Trop serré dans son pantalon.
Je me suis levée, on boit beaucoup dans un avion, on va aux toilettes. Je ne sais pas comment il a fait, il n'a pas bougé, c'est du jamais vu. Je suis revenue, je ne trouvais plus mon siège, dans la nuit on ne voit rien. Le petit jeu a continué. Un petit jeu érotique. Tour à tour on s'approche, on se décale, on change de position. Il respirait vite, et moi aussi. Je pense qu'il s'en est aperçu. Il s'est enhardi. Il a mis sa main le long de mes cuisses. J'étais en jean, ça ne pouvait pas devenir très torride. Et pourtant, ça fonctionne quand même, même en jean. Le trouble est là, le désir. On va lâcher le mot : je ressentais un violent désir. Peut-être l'attrait de l'interdit, de cette situation, ce n'est pas banal.
Le plaisir m'a tellement envahie que j'ai oublié la présence de mon mari. J'avais les yeux fermés tout le temps, je n'avais pas envie de les ouvrir, j'oubliais le cadre, j'étais dans une bulle. Pour ne pas perdre ce bonheur, vous n'osez pas bouger. A un moment, j'ai posé la tête sur l'épaule de mon mari pour tenter de m'endormir et pour arrêter un peu, pour retrouver une respiration, c'était incandescent. Du coup, j'étais tournée, je lui présentais mes fesses, il a plaqué une main sur ma fesse, sur mon jean, je suis revenue tout de suite à ma position.
Mon mari s'est levé. Nous nous retrouvons seuls tous les deux, nous avons cinq minutes. Il a un regard interrogateur, avec un petit sourire grivois : qu'est-ce qu'on fait ? J'ai pris un air un peu sérieux, c'est très hypocrite de ma part, il sait bien que je participe complètement. Je ne sais pas, sursaut de pudeur. Cela ne m'est jamais arrivé. Je n'ai jamais trompé mon mari, en vingt ans de mariage, jamais. Je n'ai jamais cherché l'aventure. J'ai trop vu mes parents souffrir. Je l'adore, mon mari. Il m'a demandé où j'habitais, si j'avais des enfants. J'ai deux filles, lui trois garçons. Aucune allusion, ni l'un ni l'autre, à cette expérience, à cette complicité sensuelle.
Nous étions comme deux gamins pris en défaut
Mon mari est revenu. Mon voisin a remis ses écouteurs et fait semblant de dormir, moi aussi. Nous étions comme deux gamins pris en défaut. Ce sont des émois d'adolescents, quand même.
Il y a des turbulences. On nous prie de nous rattacher. Il était resté sage cinq minutes. Je me disais : « Tiens, le charme n'opère plus. » Avec les turbulences, il est revenu, encore plus assidu, plus fort et plus près. Il m'a attrapé le petit doigt, il m'a presque tenu la main. Et toujours sa cuisse bien collée à la mienne. C'est difficile de mettre des mots sur des choses qui sont seulement ressenties. On est dans une espèce de bien-être. On ne voit plus les autres. On est concentrée, obnubilée par une pression sur quelques centimètres de cuisse, on entend le cœur de l'autre battre.
Un avion c'est petit, c'est étroit, on ne peut pas bouger. Tout se passe en silence, dans l'imaginaire. Chacun des deux ressent la même chose, sans pouvoir manifester. Tout ça est très subtil. Ce sont des impressions... Des gestes furtifs, avec le plus de discrétion possible, ce qui n'est pas forcément compatible avec le plaisir. Un contact qui appelle d'autres caresses, mais elles restent dans l'imaginaire. C'est quand même du plaisir à l'état pur. Un tsunami. Pour une femme. Pour un homme, je ne sais pas, quand c'est avorté... Nous étions comme deux cocottes vapeur - tendus de plaisir, d'inassouvissement, de manque. Comme quelqu'un qui attend sa came.
Et puis d'un seul coup, la lumière est revenue. Il est redescendu de son nuage. Comment cela avait-il pu durer une nuit ? C'est très efficace pour abréger un voyage. Les petits-déjeuners sont arrivés. Mon mari s'est réveillé. C'était immonde, le pain n'était pas décongelé. Mais comme d'habitude, il a englouti tout ce qui restait.
Là, je me suis tournée vers la gauche. Nous avons commencé à parler un peu de choses et d'autres. Il m'a dit qu'il aimait les photos aériennes. Il m'a dit : « Là, nous sommes au-dessus de telle ville. » Il m'a engagée à regarder par le hublot par-dessus son épaule. Nous étions tout proches, j'avais mes cheveux très près de lui.
Nous descendons sur Roissy dans la grisaille. La tristesse. C'est surtout lui qui est triste. La fin du petit jeu, de plaisir et de torture mêlés. Quand tout est contenu. Il est malheureux parce que tout cela se termine et qu'il n'y aura jamais d'assouvissement. Pas d'explosion, pas de bouquet final. Ça s'appelle rester sur sa faim. Il me jette un regard désespéré : « On ne peut pas se quitter comme ça. » Il a l'air d'un enfant que sa mère vient de laisser tout seul. Je me sens responsable de sa détresse. Ça a l'air tellement costaud, un homme. Mais malgré ses épaules carrées, c'est une petite chose fragile. Ça faisait partie du jeu, il ne fallait rien attendre de plus. C'était un rêve.
Quand on a vécu des sentiments aussi forts, la chute est brutale. La séparation est un déchirement , un cataclysme, qu'autour de nous, tout le monde ignore. Les gens se lèvent, prennent leurs bagages. Je lui serre la main. Il détourne les yeux et regarde par le hublot, où il n'y a rien à voir, puisque nous avons atterri depuis longtemps.
Malgré les crampes, une nuit sans dormir, à peine arrivée chez nous, j'ai lancé à mon mari : « Enlève ta veste, viens... » J'ai pris l'initiative des caresses. Il s'est laissé faire. Il était ravi. Il y avait urgence dans l'aboutissement des caresses trop longtemps contenues. Mon mari aurait pu dire merci à mon voisin. J'y repense le soir, la nuit. Mais je ne peux en parler à personne. C'est mon petit coin de fantasme à moi. Je nous imagine laissant libre cours à tout ce qui a été retenu et allant vers de vrais ébats, avec tout le corps. Bizarrement, là, je sors de l'avion et exit le mari. Tout va bien, tout se passe sans entraves. Vous savez, parfois on revoit les gens, j'ai lu ça dans des romans, et la magie n'opère plus. L'excitation vient de l'interdit, de l'impossibilité."
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