On dit merci Jacquie et Michel đŸ„”

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On dit merci Jacquie et Michel đŸ„”



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Accueil > MĂ©dias mutants > RĂ©seaux sociaux > On dit merci qui ? Merci, Jacquie et Michel !
Nos prénoms sont devenus une marque, un label...
Je peux témoigner que Michel existe
12 millions de CA, 14 millions de visiteurs, une galaxie de sites, trois boutiques, une cinquantaine d’employĂ©s

Michel n’a pas changĂ© de mode de vie, mĂȘme maison, aucun goĂ»t pour le bling-bling ni les mondanitĂ©s

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Qui se cache réellement derriÚre ce slogan ? Coralie Trinh Thi a rencontré le trÚs discret Michel et il lui a confié toutes les ficelles de sa réussite...
Plus personne ne peut plus ignorer leur slogan. Il a l’avantage de sonner comme une blague de cour de rĂ©crĂ©, et on se lĂąche d’autant plus que les non-initiĂ©s ne sont pas supposĂ©s saisir l’allusion grivoise. « Nous sommes un couple (presque) comme les autres. Nos prĂ©noms ? Jacquie et Michel. Sans que nous le cherchions, nos prĂ©noms sont devenus une marque, un label, un synonyme de sexualitĂ© libre et de nouvelles technologies. »
Et en 2006, cette biographie confidentielle ne relatait que les prĂ©mices d’un succĂšs stupĂ©fiant
 Le porno semble s’ĂȘtre dĂ©mocratisĂ©, mais rien n’égale le phĂ©nomĂšne J&M. Les stars du X qui ont infiltrĂ© les mĂ©dias grand public ne sont que des bombes sexuelles dĂ©samorcĂ©es par leur discours intellectuel, leur naĂŻvetĂ© ou leur glamour lisse. J&M incarne au contraire le sexe de proximitĂ©, le terroir, la « France d’en bas » , ta voisine ou mĂȘme pire : ta cousine, ta sƓur, ta mĂšre
 Le sexe y est bestial et les pratiques extrĂȘmes, parfois dĂ©viantes pour le commun des mortels.
Le couple d’instituteurs est d’autant plus cĂ©lĂšbre que personne ne les a vus. Les Daft Punk du porno cultivent le mystĂšre : un moyen de faire le buzz, une preuve que Jacquie n’existe pas, une escroquerie marketing ? Et si Michel a Ă©tĂ© vu par de nombreux tĂ©moins dignes de confiance, aucun indic n’a jamais vu Jacquie. Elle n’apparaĂźt mĂȘme pas en personnage virtuel dans la vidĂ©o animĂ©e qui retrace leur histoire.
Michel a crĂ©Ă© son premier site pĂ©dagogique suite Ă  un stage informatique de l’Éducation nationale. Devant le piĂštre succĂšs de son initiative, notre Toulousain libertin a l’idĂ©e de publier des photos sexy. À l’aube d’Internet (1999), le succĂšs de la communautĂ© polissonne est immĂ©diat. En 2004, la marque Jacquie et Michel est dĂ©posĂ©e, et en 2005 on atteint le million de visiteurs mensuels. Michel quitte son emploi pour se consacrer Ă  sa passion. Les internautes postent leurs premiĂšres vidĂ©os en 2007, grĂące aux progrĂšs de la technologie. DĂšs 2010, sur candidatures spontanĂ©es, J&M alimente le site de productions maison. Le slogan apparaĂźt en 2011, au hasard d’un tournage : « Merci, Jacquie et Michel » , le cri du cƓur d’une actrice particuliĂšrement comblĂ©e et reconnaissante. Une des versions de la lĂ©gende prĂ©cise que c’était un des rares tournages oĂč Jacquie et Michel Ă©taient prĂ©sents. AprĂšs enquĂȘte, il existe sĂ»rement une M me Michel
mĂȘme si Jacquie n’est peut-ĂȘtre que son pseudo.
Le couple le plus cĂ©lĂšbre du X n’a jamais exposĂ© ni ses parties intimes, ni son visage, et mĂȘme les interviews sont refusĂ©es, que l’on travaille au Monde ou au « SupplĂ©ment » . De trĂšs rares privilĂ©giĂ©s ont pu dialoguer avec
 le responsable communication de J&M. La superstar, Michel, n’est apparue (par tĂ©lĂ©phone ou en silhouette floue derriĂšre une fenĂȘtre) qu’à d’encore plus rares Ă©lus. Mon passĂ© de pornostar ne suffira pas Ă  m’offrir un passe-droit – Michel ne semble pas faire partie du sĂ©rail de l’industrie du X. Au contraire, son succĂšs d’outsider dilettante a certainement suscitĂ© l’hostilitĂ© de certains professionnels de la profession. C’est donc par la voie amicale que je le sollicite : on se porte garant pour moi, et Michel accepte de me parler moins de quinze minutes
 mais pour l’interview, ce sera avec le responsable de com, il a dit.
Leur cĂ©lĂ©britĂ© dĂ©lirante justifie cette prudence. Elle ne se limite pas aux salles de garde : Cauet, motards, supporters, pompiers, militaires, flics (et toutes les CSP Ă  forte testostĂ©rone...) leur rendent hommage, mais aussi les humoristes (de Nicolas Canteloup Ă  Kev Adams), les artistes (de Julien DorĂ© Ă  JoeyStarr), et jusque dans l’émission « Motus » . Une simple banderole des supporters lyonnais provoque une vague d’articles dans les mĂ©dias sport
 et gĂ©nĂ©ralistes.
À cette notoriĂ©tĂ© rubrique « Insolite » succĂšde trĂšs vite la spirale du scandale national. En 2013, un lycĂ©e de CompiĂšgne s’indigne d’ĂȘtre exposĂ©, par le biais d’une surveillante trop dĂ©lurĂ©e. En 2014, une aspirante Miss Troyes est radiĂ©e suite Ă  la dĂ©couverte de ses vidĂ©os. En janvier 2015, un Belge dĂ©couvre que sa friterie a servi de dĂ©cor, et clame dans tous les mĂ©dias complaisants qu’il va porter plainte – avant de se raviser devant l’ampleur de la pub, et il crĂ©e mĂȘme deux burgers en hommage. En mars 2015, Oise Hebdo va jusqu’à mettre en une la photo d’un tournage sauvage dans un parc de CompiĂšgne (encore). L’article « pute Ă  clic » le plus consternant concerne le scandale de LouĂ© – Le Plus de L’Obs titre : « Ce film Ă©cƓurant salit nos poulets et notre terre » . #NotGorafi
J’appelle Michel et je commence par le remercier (si ! ) d’accepter de me parler. Il rĂ©pond d’un accent trĂšs chantant : je pourrai dĂ©jĂ  tĂ©moigner que Michel existe et qu’il est bien de Toulouse. Vu l’acharnement des mĂ©dias, je comprends qu’ils se protĂšgent par le secret. Il rectifie : ils ont toujours Ă©tĂ© discrets, depuis le dĂ©but. Une Ă©vidence dans la culture du libertinage, mĂȘme si le lynchage mĂ©diatique n’a rien arrangé 
Nous discutons si naturellement qu’il ne mentionnera mĂȘme pas le responsable communication. Les chiffres et polĂ©miques ne m’intĂ©ressent pas plus que la lĂ©gende officielle, je veux l’humain. Les enquĂȘtes rĂ©vĂšlent ces chiffres comme des secrets honteux : 12 millions de CA, 14 millions de visiteurs, une galaxie de sites, trois boutiques, une cinquantaine d’employĂ©s
 Et tous ces scandales d’exhibitions sur la voie publique sont ridicules quand on connaĂźt le X : j’ai tournĂ© dans la rue, dans la forĂȘt, dans le mĂ©tro et dans le RER, sans aucune autorisation. La base. Leur succĂšs est l’alibi parfait pour les faux scandales : les mĂ©dias mainstream racolent avec le porno sous couvert de le dĂ©noncer. Il rit : « C’est vrai, nous sommes un parfait alibite ! »
On s’indigne que les filles soient des actrices, payĂ©es (!), que leur CV soit bidonnĂ©. Seul un tiers des amatrices aurait posĂ© une candidature spontanĂ©e, mais c’est un score miraculeux. Le modĂšle Ă©conomique et « artistique » du porno amateur existe depuis une Ă©ternitĂ©. Et il ne s’agit pas tant de mensonge que de raconter des histoires

Michel proteste Ă©nergiquement : il ne fait pas de porno amateur comme celui dont je parle. Il y a deux sites vraiment distincts : l’originel, jacquieetmichel.net, rĂ©servĂ© aux vrais amateurs, et jacquietemicheltv.net, qui diffuse ses productions. Celles-ci ne sont pas du porno amateur, mais du porno-rĂ©alitĂ©. J’essaie de comprendre : OK, on ne devrait pas dire porno amateur, mais pro-am. Mais quelle diffĂ©rence entre le pro-am et son porno-rĂ©alité ? Il affirme que si certaines filles sont payĂ©es, elles ne le font pas pour l’argent, elles veulent rĂ©aliser un fantasme, ils viennent juste filmer. « Chez nous les filles font ça vraiment par plaisir. Ce que l’on veut c’est de l’authentique, des situations vraies. »
J’évoque les « affaires » oĂč le CV s’est rĂ©vĂ©lĂ© inexact, les deux lycĂ©es (ni pionne, ni prof) ou Loué (ni Ă©leveuse, ni de LouĂ©) : vraiment, ils n’arrangent jamais la bio pour une histoire ou un dĂ©cor plus excitants ? « Jamais ! Peut-ĂȘtre que certaines filles mentent, ou parfois, juste un dĂ©tail, pour protĂ©ger la vie privĂ©e d’une actrice  » Soit. Mais une flotte de rĂ©alisateurs travaille pour J&M, forcĂ©ment issus du pro-am. Impossible qu’ils n’en maĂźtrisent pas les codes et les usages. Michel, qui n’avait quasi jamais vu de porno avant d’en rĂ©aliser un, est d’une naĂŻvetĂ© dĂ©sarmante sur l’industrie du X : « Je crois que l’on a un peu rĂ©inventĂ© le porno. Les films scĂ©narisĂ©s c’est ennuyeux, et nous on a fait quelque chose de complĂštement diffĂ©rent. On a commencĂ© Ă  filmer la voisine, des femmes qui n’étaient pas destinĂ©es Ă  faire du porno. »
Ce que fait dĂ©jĂ  le pro-am depuis des dĂ©cennies, Ă  commencer par Laetitia, reine de l’amateur des annĂ©es 1990. Mais Michel ne connaĂźt pas Laetitia et il supervise et valide chaque scĂšne sous-traitĂ©e, bien au-delĂ  de la simple trademark « Merci qui ? » , que chaque actrice doit scander pendant tout le tournage.
Michel n’a pas changĂ© de mode de vie, mĂȘme maison, aucun goĂ»t pour le bling-bling ni les mondanitĂ©s. Le couple ne frĂ©quente plus le milieu libertin. L’étĂ© dernier, ils sont bien allĂ©s au Cap d’Agde mais ils ne sont restĂ©s que deux jours, parce qu’on les a reconnus. Il ne gĂšre plus les sites – il est larguĂ© par la technologie – et ne va plus que trĂšs rarement sur les tournages. Je doute que les tournages J&M se passent comme il l’imagine, mais il a raison quand il affirme faire du porno-rĂ©alitĂ©. La tĂ©lĂ©-rĂ©alitĂ© est forcĂ©ment mise en scĂšne, pour retranscrire par l’image une histoire, aussi vĂ©ridique soit-elle. Et la simple prĂ©sence d’une camĂ©ra altĂšre cette « rĂ©alité » .
Le porno J&M est aussi « vrai » que la tĂ©lĂ©-rĂ©alitĂ© – Michel se positionne dans l’hĂ©ritage de « Strip-tease » , mais la majoritĂ© de ses rĂ©alisateurs navigue sans doute entre « Confessions intimes » , « Tellement vrai » et « L’Ile de la tentation » . Le rĂ©alisateur de « Paris DerniĂšre » m’a affirmĂ© que beaucoup de ses spectateurs croient qu’il se promĂšne au hasard des rues et que ses rencontres sont fortuites. Faut-il condamner l’innocence du spectateur ou participe-t-elle Ă  la magie de toute industrie du divertissement ?
AprĂšs vĂ©rification, le site originel (entiĂšrement gratuit ! ) ne propose que d’authentiques photos et vidĂ©os amateurs – et je n’avais pas Ă©tĂ© troublĂ©e par leur charme improbable depuis bien longtemps. Le webdesign date d’ailleurs du siĂšcle dernier – vintage.
Les vidĂ©os porno-rĂ©alitĂ© de jacquieetmicheltv.net ne se distinguent pas vraiment du pro-am : interview, tournĂ©-montĂ©, pratiques extrĂȘmes, subjectif et voix off, des recettes classiques. Mais le site joue sur « l’authenticité » , la proximitĂ©, le sentiment de communautĂ© comme aucun autre. AprĂšs le (gĂ©nĂ©reux) extrait gratuit, on n’achĂšte pas la vidĂ©o intĂ©grale HD
 on paie une participation symbolique pour contribuer aux frais d’hĂ©bergement, 3 euros par Allopass. Quand le site propose un abonnement illimitĂ© (comme tous les autres) Ă  30 euros, soit 1 euro par jour, on le perçoit plus comme une adhĂ©sion pour « faire partie de la bande » .
L’humour graveleux participe Ă  l’ambiance. « On pousse la beaufitude pour la dĂ©passer. — Vous assumez la beaufitude que l’on vous reproche ? » Je n’aurais jamais osĂ© prononcer le mot en premier. « Non, on conchie ceux qui nous traitent de beaufs. » C’est un Ă©quilibre paradoxal, comme toutes les caractĂ©ristiques de cet ovni. « Il y a des actrices qui ne veulent pas dire “Merci qui ? ”, elles trouvent ça dĂ©gradant. » J’en aurais fait partie. « Nous, on veut juste s’amuser sans prise de tĂȘte. »
Une part de leur succĂšs tient de la mĂȘme logique que celui du canard vibrant : un sextoy bas de gamme infantilisant
 mais bon esprit, trĂšs accessible et dĂ©culpabilisant. Une forme indĂ©niable de dĂ©dramatisation et de dĂ©mocratisation du sexe.
Dans les boutiques, T-shirts, mugs, coques et mĂȘme biĂšre J&M se vendent sĂ»rement plus que les dvd ou sextoys, et beaucoup de leurs fans n’ont sans doute jamais vu une de leurs vidĂ©os en entier. Autre paradoxe, J&M, roi du porno de proximitĂ©, cartonne en organisant des soirĂ©es dans les boĂźtes de province, mais caracole Ă  la pointe de la technologie d’avant-garde. Outre les nombreux sites de vidĂ©os, rencontre, visiochat, il s’est lancĂ© dans le porno haut de gamme avec J&M Élite, mais aussi dans un Netflix porno avec PornEverest , et mĂȘme dans la rĂ©alitĂ© virtuelle 3D avec J&M Immersion .
J&M matĂ©rialise les fantasmes de « rĂ©alité » , s’enracine dans le terroir pour surfer sur l’avenir, et assurĂ©ment, transforme le buzz en business.
C EST DE L ARNAQUE PUR .pas de réponse au messages
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