Analyse de l'attaque de la base aérienne d'Engels du 5 décembre 2022

Analyse de l'attaque de la base aérienne d'Engels du 5 décembre 2022

Michael Ludwig

Le 5 décembre 2022, une attaque sur la base aérienne russe d'Engels près de Saratov, à 720 km à l'est de Kharkov, a eu lieu. Des photos satellitaires et une vidéo d'une caméra de surveillance permettent d'établir la nature de l'attaque.

Liste des médias consultés pour établir l'analyse:

Voici un extrait de l'imagerie satellitaire provenant de Google Maps datant de 2022, probablement assez récent compte tenu de la présence de deux avions placés de manière identique par rapport à ce que l'on aperçoit sur la photo satellitaire relayée par Colonel Cassad, et montrant la base aérienne d'Engels, avec, comme seule manipulation, un avion Tu-95 inséré à l'endroit où l'on l'aperçoit sur la photo satellitaire sous-mentionnée:

Photo satellitaire provenant de Google Maps, sources indiquées en bas de l'image, montrant la partie de la base aérienne d'Engels qui a été attaquée par un objet volant non-identifié.

Voici la photo du Twitter de SarahHa42:

Photo satellitaire publiée dans le Twitter de SarahHa42.

🎥 La première des deux vidéos de caméras de surveillance relayées dans la chaîne Telegram de Rybar permet de faire les observations suivantes:

👂 A 14 secondes, on entend le bruit du moteur d'un objet volant qui s'approche et s'éloigne à grande vitesse et qui vole à basse altitude.

👁 A 41 secondes, on aperçoit au fond l'éclair de l'explosion. 💥

👂 A 61 secondes, on entend le bruit de la détonation. 💥 Plus encore que l'éclair, le coup sec au bout de 20 secondes d'attente, ce qui correspond à une distance de presque 7 km, donne une impression de l'intensité de la détonation. Elle était tout à fait considérable.

🧮 Ces écarts temporels établis par de simples observations permettent de conclure que la vitesse de l'objet est d'environ 17/20 soit 85% de la vitesse du son au niveau du sol.

✈ Cette vitesse de l'objet volant inconnu correspond raisonnablement à la vitesse de croisière d'un drone soviétique du type Tu-141 Strij (Wikipédia), qui est indiquée comme 1000 km/h. Elle correspond également à la vitesse d'un missile de croisière américain du type BGM-109 Tomahawk (Wikipédia), qui est indiquée comme 885 km/h.

⚔️ C'est la première de ces deux possibilités qui est évoquée par le ministère de la défense russe (lien Telegram).

Le Strij, bien que conçu et répertorié comme drone de reconnaissance, présente toutes les caractéristiques d'un missile de croisière: trajectoire programmée, possibilité de vol à basse altitude, vitesse de croisière élevée. Sa mission affichée de véhicule de reconnaissance avec retour et atterrissement par parachute implique une navigation précise.

Il paraît possible qu'un tel véhicule ait été modifié pour emporter une bombe qui aurait pu être déclenchée en fonction de coordonnées géographiques fournies par un système de navigation satellitaire, transformant le drone de reconnaissance peu typique par rapport à ce qu'on utilise depuis au moins l'an 2000 en un missile de croisière dont il présentait déjà toutes les caractéristiques techniques, abstraction faite du moteur de type turbojet, moins efficace que le type turbofan utilisé dans les missiles de croisière modernes, et limitant ainsi le rayon d'action du missile à 1000 km, y compris un possible retour.

On peut même imaginer que l'incident survenu le 10 mars 2022 à proximité de Zagreb, où un Tu-141, équipé d'une bombe sans explosifs militaires, s'est écrasé (voir l'article sur l'appareil référé ci-dessus), constituait l'échec d'une tentative de mise au point de cette transformation de l'appareil.

➡️ De toute façon, c'était un missile de croisière ennemi chargé avec une quantité d'explosifs considérable (au moins 100 kg mais peut-être 300 kg ou plus), qui a réussi à pénétrer l'espace aérien russe à une profondeur d'environ 500 km et à atteindre sa destination sans être abattu.

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