Elle avait trop mal
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Aucun homme ne mĂ©rite que l'on meurt Ă cause de lui. Votre douleur est immense et il faut l'avoir vĂ©cue pour comprendre. Vous semblez ĂȘtre jeune, donc la vie est devant vous pleine d'espoir et de belles surprises. Dites-vous bien que cet homme ne vaut pas la peine de le regretter. Au contraire, c'est une chance de l'avoir dĂ©masquĂ© aussi tĂŽt. Bon courage, seul le temps va apaiser votre douleur.
AprÚs un an et demie de relation, mon conjoint me dit "et si tu allais chez ton pÚre pour que moi aussi je respire, pour avoir du temps". Je l'ai laissé. Au début cela a été dure. Et hier soir, quand je suis retourner a la maison pour récupérer des affaires, je devais envoyer un message Facebook à un ami, et il y avait son ordinateur. Il envoyé des messages comme si c'était à moi qu'il parlait à la copine d'un de ses meilleurs potes. Ils se disaient des mots d'amour, ils disaient de moi que de toute façon je n'ai jamais rien été. Cette fille me disait que je pouvais avoir confiance en elle, pareil pour mon conjoint, qu'il ne me tromperai jamais, mais en réalité non, il ne fallait pas que j'ai confiance en lui.
J'ai qu'une seule envie, c'est de mourir. Toute ma vie on m'a trompé, prise pour une co***. Je n'en peux plus ....
@ l'anonyme du 14 août.
Ne vous dévalorisez pas, vous dites ne pas avoir été à la hauteur; je ne pense pas qu'il en soit ainsi.
Votre mari menait probablement une double vie depuis longtemps.
Peu d'hommes ont le courage de partir.
Auriez-vous prĂ©fĂ©rĂ© ĂȘtre trompĂ©e le reste de votre vie ?
Ainsi, c'est clair et net et son dĂ©part vous permettra peut-ĂȘtre de rencontrer quelqu'un qui vous rendra heureuse.
Oh ! pas tout de suite, ces blessures lĂ , mettent bien du temps Ă s'estomper, mais rien n'arrive par hasard et peut-ĂȘtre que cette Ă©preuve amĂšnera un autre bonheur, encore plus grand.
Chaque peine apporte un joie.
Laissez le temps Ă la joie de venir jusqu'Ă vous.
Bien Ă vous.
O
Bravo et bonne chance dans votre nouvelle vie. Je n'ai pas eu ce courage.
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On la sent, comme une prĂ©sence palpable, insidieuse et dĂ©vastatrice, lâinfidĂ©litĂ©, et, dans son sillon, lâautre, la rivale. Liaison ou accident de parcours ? Notre crocodile Ă©motionnel ne fait pas la diffĂ©rence, celui que nous aimons nous a trahie, et cela nous expĂ©die au bord du gouffre. Toujours. Toutes. MĂȘme si certaines affirment le contraire, peut-ĂȘtre pour se protĂ©ger, ou parce que leur couple repose sur un autre contrat... Il y a eu un avant, oĂč lâon conjuguait libertĂ© de chacun avec confiance, et puis il y a aujourdâhui, qui semble dire : "Au-delĂ de cette limite, votre idĂ©al de couple nâest plus valable."Â
"Lâinsupportable, câest que lâautre jouisse et dĂ©sire ailleurs. A ce moment-lĂ , câest comme si lâon nâexistait plus pour lui. DâoĂč ce sentiment de mourir, Ă©crasĂ©e de souffrance", explique la psychanalyste Sophie Cadalen.
Et puis, la rivale hante dĂ©sormais notre espace vital, elle consume notre air, depuis que, mĂȘme pour un instant seulement, elle nous a remplacĂ©e auprĂšs de lui : "Elle a pris ma place, elle incarnait ma peau, elle jouait mon rĂŽle, souffle StĂ©phanie. En plus, la ressemblance physique entre nous deux Ă©tait si frappante quâelle Ă©tait le double parfait, cela donne le sentiment dâĂȘtre effacĂ©e, dâĂȘtre tuĂ©eâŠ" Vertigineux, forcĂ©ment.Â
Adulte, nous reprenons notre rĂŽle affectif lĂ oĂč nous lâavons laissĂ© enfant, avec lâintention, cette fois, dâen sortir vainqueur, dĂ©code la sociologue Patricia Delahaie. Câest ainsi que certaines femmes, habituĂ©es, par exemple, Ă faire des pieds et des mains pour amadouer leur pĂšre, choisissent des hommes inaccessibles ou qui les mettent en concurrence avec dâautres femmes." Pour elles, lâinfidĂ©litĂ© marque au fer rouge un nouvel Ă©chec.
Ătre une femme trompĂ©e, câest aussi prendre de plein fouet ses rĂȘves déçus : non, on nâest pas tout pour lui ; non, on nâest pas la femme idĂ©ale capable de lui rendre fade toute tentation et de lâempĂȘcher de succomber dans dâautres draps ; oui, il y avait des faux-semblants accrochĂ©s Ă notre idĂ©e du couple : "On peut se revendiquer femme libĂ©rĂ©e, avec Ă lâintĂ©rieur du couple, chacun ses moments Ă soi, mais la douleur de lâinfidĂ©litĂ© rĂ©vĂšle que notre discours nâĂ©tait peut-ĂȘtre quâune façade, souligne Sophie Cadalen. Nos certitudes et notre raisonnement construit sâeffondrent, et câest une dĂ©chirure." Blessure si insupportable que, dans le kit de survie, on dĂ©goupille le clash. Ce vacillement Ă©clair qui flanque Ă la porte une histoire dâamour. "Le clash permet de ne toucher Ă rien dans la relation, de ne pas fouiller. Il Ă©vite de mesurer sa part de responsabilitĂ©", complĂšte la psychanalyste. Finalement, la douleur est Ă tous les Ă©tages Ă©motionnels de lâinfidĂ©litĂ©. Avec le temps, chacune bricole sa guĂ©rison. Pour sauver sa peau et se reconstruire. Certaines pardonnent, dâautres pas. Pour oser croire encore et se donner la chance dâun nouvel amour. Avec lui ou sans lui.
Delphine, 44 ans, se souvient comme si c'Ă©tait hier du moment oĂč son mari sâest plantĂ© devant elle pour lui dĂ©clarer : âUne femme que jâai connue il y a longtemps mâa tĂ©lĂ©phonĂ© au bureau ce matin. Quand on sâest quittĂ©s, elle ne mâavait pas dit quâelle Ă©tait enceinte. Sa fille, qui a 17 ans aujourdâhui, veut me connaĂźtre. Elle mâaffirme quâelle est ma fille.â Plus il parlait, moins elle entendait ce qu'il Ă©tait en train de lui dire. En rĂ©alitĂ©, elle calculait : leur fille aussi allait avoir 17 ans. Cela voulait dire que l'amour de sa vie, son homme, avait fait lâamour Ă une autre alors qu'elle Ă©tait enceinte.Â
"Au bout de vingt ans, quâil donne un coup de canif dans le contrat, jâaurais pu le mettre sur le compte de la lassitude, ça mâaurait peut-ĂȘtre fait moins mal", se dit-elle, pensive. Elle Ă©tait KO, anesthĂ©siĂ©e. Elle n'arrivait mĂȘme pas Ă extĂ©rioriser sa souffrance. "En fait, je crois que jâai voulu jouer Ă la femme trompĂ©e digne, lui prouver quâil avait eu raison de me choisir, moi, la femme classe, au-dessus dâune histoire de cul datant de presque vingt ans", se souvient-elle.
Nous avons dĂ©cidĂ© de faire un break de quelques semaines pour repartir sur de nouvelles bases : jour et nuit, jâai rĂ©flĂ©chi, jâavais des flambĂ©es de haine, mais il me manquait
Sauf que, lorsquâil a semblĂ© prĂȘt Ă classer le dossier, presque certain qu'elle allait passer lâĂ©ponge, quelque chose sâest brusquement fissurĂ© en elle. "JâĂ©tais Ă©puisĂ©e, ma souffrance a Ă©clatĂ©, la rage avec, et il a presque pris le cendrier Ă la tĂȘte. Jâavais envie de violence, de le frapper, de grossiĂšretĂ©s, de lui faire plus mal encore quâil me faisait mal. Je lui ai balancĂ© Ă la figure et jâai jetĂ© contre les murs les cadeaux quâil mâavait faits, ça ne tapait jamais assez fort pour me libĂ©rer", raconte Delphine, encore excĂ©dĂ©e.Â
Elle s'est dĂ©chaĂźnĂ©e, puis littĂ©ralement effondrĂ©e. "Mon couple nâavait Ă©tĂ© quâun leurre. Depuis des annĂ©es, je revendiquais haut et fort notre bonheur familial, alors que jâĂ©tais la cocue qui sâignore, jâĂ©tais la conne qui nâavait pas su voir", dĂ©plore-t-elle. Cette infidĂ©litĂ© remettait en cause la lĂ©gitimitĂ© de leur union, ses sentiments pour elle, et le respect qu'il Ă©tait sensĂ© avoir. Il avait menti, pendant des annĂ©es.Â
Delphine a dĂ» alors faire le deuil de ses illusions, de ses projections aussi. Elle a cherchĂ© Ă savoir ce que cette femme, Ă qui elle n'en voulait pourtant pas puisque c'Ă©tait lui le traĂźtre, avait de plus qu'elle, et pourquoi ils avaient rompu. "Il prĂ©tendait que câĂ©tait vieux, et je savais que câĂ©tait vrai. Il mâassurait quâil nâavait aimĂ© que moi. LĂ aussi, je lâai cru. Nous avons dĂ©cidĂ© de faire un break de quelques semaines pour repartir sur de nouvelles bases : jour et nuit, jâai rĂ©flĂ©chi, jâavais des flambĂ©es de haine, mais il me manquait. Il venait toutes les semaines Ă la maison voir nos enfants; un soir, il est restĂ© dormir et il nâest plus reparti", raconte-t-elle en conclusion.Â
Maeva, 40 ans, a elle aussi connu l'infidĂ©litĂ©. Une part d'elle est morte ce jour-lĂ . C'Ă©tait il y a six ans. Cette double trahison, de son partenaire et de sa confidente, l'a meurtrie. "Elle, câĂ©tait mon amie. Je lui demandais conseil, vu que jâavais le sentiment que mon mari ne me regardait plus, et elle sâest jouĂ©e de moi en me consolant dâabord, et en rĂ©pĂ©tant ensuite mes Ă©tats dâĂąme sur lâoreiller. Jamais je nâai soupçonnĂ© quâelle Ă©tait sa maĂźtresse", dĂ©bute-t-elle.Â
Pourtant, ils allaient souvent faire des virĂ©es ensemble, sans Maeva, qui en tout naĂŻvetĂ© se rĂ©jouissait mĂȘme de ce lien entre son Ă©poux et sa meilleure amie . La vĂ©ritĂ©, elle l'a apprise le jour oĂč "soi-disant", ils se sont retrouvĂ©s par hasard Ă lâĂ©tranger, au mĂȘme moment. "Pour faire diversion, elle mâa alors dit quâelle avait vu mon homme avec une autre, qui nâa jamais existĂ©... Mon mari aussi a toujours niĂ©. Jâai fini par engager un dĂ©tective, qui a confirmĂ© mes soupçons. J'Ă©tais une femme trompĂ©e", dĂ©plore Maeva, blasĂ©e.Â
Puis l'histoire est devenue sordide. Son mari et son amie ont commencĂ© Ă accuser Maeva d'affabuler. Puis, ils se sont mis Ă colporter des ragots sur elle, auprĂšs de leur entourage, remettant en cause jusqu'Ă la paternitĂ© de son premier enfant. Tout s'effondrait autour d'elle. "Cette trahison mâa dĂ©truite et mâa plongĂ©e dans un dĂ©sespoir si profond que jâai fait trois tentatives de suicide. Quâil parte, jâaurais pu lâaccepter, mais pas avec une amie. TrompĂ©e sur les valeurs qui me sont fondamentales â la confiance, la loyautĂ©, lâengagement, la sincĂ©ritĂ© â, jâai fini par ne plus croire en rien", raconte la femme, dĂ©molie.Â
"Jâen ai perdu toute estime de moi, jâai eu besoin de me salir, je ne savais plus qui jâĂ©tais. Inconsciemment, je me suis mise Ă la place Ă laquelle il mâavait cataloguĂ©e : rien. Je me suis guĂ©rie en collectionnant les aventures, jâai voulu mâenivrer de plaisir charnel pour me rassurer, mais je me suis fait trĂšs mal, en rĂ©alitĂ©. Je mâen veux aussi de ne pas avoir masquĂ© ma tristesse et mon dĂ©sarroi intenses. Câest plus facile de remonter la pente sans le regard des autres, qui vous renvoie la honte de celle qui a Ă©tĂ© trahie et qui a Ă©tĂ© si naĂŻve", explique Maeva, encore atteinte par cette Ă©preuve.Â
DĂ©sormais, elle sait quâil faut savoir Ă©couter, ce que les autres essayent de nous dire. "Si je lâavais fait, jâaurais su Ă lâavance, car il sâĂ©tait dĂ©jĂ comportĂ© ainsi avec dâautres femmes. Et surtout, ne croyons pas, Ă tort, quâavec nous, ce sera diffĂ©rent", se dit-elle. Aujourd'hui, elle ne sait plus vraiment si elle croit en l'amour, mais elle se laisse le droit de vivre pleinement ses aventures, sans y porter trop d'espoirs tout de mĂȘme.Â
Camille, 35 ans, est elle-aussi une femme trompĂ©e. Cela faisait un peu plus de deux ans qu'elle filait le parfait amour avec Jean. Mais un jour, alors qu'ils rentraient de week-end, son instinct l'a poussĂ© Ă demander Ă ce dernier ce qui le stressait depuis quelques semaines. "Il sâest assis sur le lit pour me dire quâil avait couchĂ© avec lâune de ses collĂšgues. Jâai cru mourir. Il avait posĂ© ses mains sur une autre. Il avait pĂ©nĂ©trĂ© une autre. Jâavais des visions pornographiques Ă en avoir la nausĂ©e", se souvient-elle.Â
Câest son corps qui a parlĂ© en premier : elle a eu mal partout, comme si lâon lâavait tabassĂ©e, une douleur qui venait des tripes. Elle avait des spasmes dans le ventre. Il a alors voulu sâinstaller chez un copain, le temps que la situation se calme, et Camille a sombrĂ©. "Pendant un mois, il nâa pas tĂ©lĂ©phonĂ© et nâa pas non plus rĂ©pondu Ă mes appels. Je lâimaginais coucher avec cette femme encore et encore", continue-t-elle.Â
Cela m'a dĂ©truite de me dire qu'il pouvait jouer la comĂ©die et faire comme si de rien n'Ă©tait. Comme un coup de poignard dâĂȘtre Ă la fois trahie et dupĂ©e. D'autant qu'elle se rendait compte alors qu'il ne l'aimait pas assez pour lui ĂȘtre fidĂšle. "Tout avait Ă©tĂ© bidon, ses mots et ses promesses. Il avait balayĂ© notre histoire, sans chercher Ă se faire pardonner.
Pourtant, elle Ă©tait prĂȘte Ă accepter lâinacceptable. "Je lâaimais tant que, malgrĂ© tout, jâaurais pardonnĂ© pour que continue notre histoire. Jâavais la naĂŻvetĂ© de croire que je parviendrais Ă capter ses sentiments pour moi seule, sans quâil nâait plus de dĂ©sir pour dâautres. Jâai cru que jâallais mourir une seconde fois quand il mâa dit quâavec moi, ça ne lâintĂ©ressait pas. Câest comme sâil mâavait fusillĂ©e", sanglote-t-elle.Â
Aujourd'hui, elle se dit tristement qu'elle n'avait quâune femme de plus dans sa vie, alors que, pour elle, il Ă©tait lâhomme de la sienne.Â
Claude Halmos, psychologue, dĂ©crypte pour nous le syndrome de la femme trompĂ©e, entre douleur et remise en question totale.Â
Marie Claire : LâinfidĂ©litĂ© est-elle forcĂ©ment douloureuse ?
Claude Halmos : Oui, elle lâest forcĂ©ment, toujours, car ĂȘtre une femme trompĂ©e revient Ă faire face Ă une rupture amoureuse , mĂȘme si câest pour une heure. En couchant avec une autre, celui que lâon aime quitte la relation, lâamour et le dĂ©sir quâil avait pour nous, pour le donner Ă une autre. Il dĂ©serte sans prĂ©venir le lieu de lâintimitĂ© Ă deux. Si cela mĂšne certaines au dĂ©sespoir ou Ă la dĂ©pression , câest parce que cela renvoie Ă la soliditĂ© du narcissisme que lâon a construit depuis la toute petite enfance, câest-Ă -dire Ă lâimage que lâon a de soi-mĂȘme. Les bases remontent probablement dĂ©jĂ Ă la façon dont on a Ă©tĂ© voulue trĂšs profondĂ©ment par nos parents, et notamment par notre mĂšre. Ensuite, sâajoute ce que lâon a reprĂ©sentĂ© pour nos parents : un enfant qui sent quâil est une source de joie et que ses parents seraient infiniment malheureux sâil nâĂ©tait pas lĂ , ou plus lĂ , sait quâil a une valeur et quâil compte. Par ailleurs, est-on considĂ©rĂ© comme une personne intelligente, intĂ©ressante, ayant une parole qui compte ou pas ? De tout cela dĂ©pend lâimage que lâon a de soi adulte. Or, ĂȘtre trompĂ©e vient prĂ©cisĂ©ment frapper dans tout cela, car lâinconscient ne connaĂźt pas le temps, et câest lâenfant en nous qui souffre.
M. C. : Quelles blessures de lâenfance peuvent ĂȘtre rĂ©activĂ©es ?
C. H. : Le sentiment dâabandon quand un petit frĂšre est arrivĂ© â "Maman ne mâaime plus, elle aime lâautre" â, la prĂ©fĂ©rence pour un autre de la fratrie ou encore le sentiment dâĂȘtre un individu Ă qui il manque quelque chose : "Mon pĂšre nâaimait que les garçons..." Si lâenfant sent quâil nâest pas aimĂ©, parce quâĂ un moment de sa vie, la mĂšre ne le peut pas, parce que son histoire lâempĂȘche dâavoir les fils de la maternitĂ© suffisamment branchĂ©s pour ĂȘtre totalement lĂ avec lui â parce quâelle est perdue, submergĂ©e par ses problĂšmes ou dĂ©pressive â, lâenfant interprĂšte : "Je ne suis pas aimable." Et il cherchera dĂ©sespĂ©rĂ©ment tout ce quâil peut faire pour ĂȘtre, par exemple, la petite fille idĂ©ale, selon lâidĂ©al supposĂ© de la mĂšre.
La femme abandonnĂ©e rejoue dans le couple cette douleur : "LĂ aussi, jâai essayĂ© dâĂȘtre la femme quâil aimait, dâavoir la silhouette quâil voulait, dâavoir telle attitude au lit, etc., mais il est allĂ© vers une autre." Et cela renvoie Ă lâidĂ©e : "Un autre enfant, ma mĂšre lâaurait aimĂ©."
M. C. : Est-ce pour cela que mĂȘme une nuit sans lendemain peut faire cruellement souffrir ?
C. H. : Le rapport Ă la sexualitĂ© est diffĂ©rent d'une personne Ă l'autre. Pour certains, la sexualitĂ© nâimplique pas forcĂ©ment les sentiments et ne remet pas en cause ceux quâils ont pour leur partenaire. Mais d'autres, une aventure ou une liaison de l'autre ouvre une blessure identique : "Il a Ă©tĂ© attirĂ© par une autre, quelque chose chez elle lui a fait signe, tandis que moi, je ne faisais plus signe ou plus assez." Cela peut renvoyer Ă lâindiffĂ©rence de la mĂšre ou du pĂšre, par exemple. Et puis, on rĂ©alise aussi que lâon nâest pas tout pour lui, quâil nous Ă©chappe, alors que nous sommes des anciens enfants qui veulent ĂȘtre tout pour lâautre.
M. C. : Mais alors, comment expliquer que certaines disent ne pas souffrir ?
C. H. : Ces femmes le disent sans doute pour se persuader elles-mĂȘmes. En rĂ©alitĂ©, elles veulent se protĂ©ger, parce que reconnaĂźtre quâelles souffrent serait infiniment plus douloureux encore. En effet, certaines personnes se sont comme anesthĂ©siĂ©es parce quâelles ont vĂ©cu dans lâenfance des souffrances telles que si elles les avaient ressenties, elles en seraient probablement mortes ou auraient basculĂ© dans la folie. Il existe aussi des femmes qui dĂ©connectent la sexualitĂ© de tout affect (bien que ce soit surtout masculin). Elles ne se sentent pas trompĂ©es, puisque, pour elles, il nây a pas vraiment de lien Ă lâautre. Câest le cas de celles qui pratiquent lâĂ©changisme , par exemple, et qui peuvent y trouver une source dâexcitation. Mais Ă ce moment-lĂ , on ne peut plus parler de tromperie, on est dans un autre registre. Elles vivent une organisation diffĂ©rente du rapport Ă lâautre et de la sexualitĂ©. Mais, pour la plupart des femmes, aimer implique lâexclusivitĂ© Ă la fois du sentiment, du dĂ©sir et de la sexualitĂ©.
M. C. : Quâest-ce qui se joue dans la comparaison avec la rivale ?
C. H. : Lâhomme sert de mĂštre Ă©talon pour mesurer la fĂ©minitĂ©, la sĂ©duction, la capacitĂ© Ă susciter lâamour, etc. La rivale est ainsi celle qui a, imaginairement, tout ce que lâon nâa pas, selon lâhistoire de chacune. Par exemple : "MalgrĂ© tous mes efforts, ma mĂšre ne mâaimait pas parce quâelle trouvait toujours que jâĂ©tais trop ceci ou pas assez cela... Or, puisque cette autre femme parvient Ă se faire aimer, câest bien parce quâelle possĂšde tout ce que je nâai pas, et que je ne suis pas grand-chose."
M. C. : Comment arrive-t-on Ă pardonner et Ă se reconstruire ?
C. H. : Cela dĂ©pend de comment on a Ă©tĂ© trompĂ©e. Il y a des hommes qui trompent "correctement", si lâon peut dire, ils continuent Ă aimer, Ă respecter et Ă dĂ©sirer leur femme malgrĂ© tout. MĂȘme sâils en dĂ©sirent une autre, ils ne la mettent pas Ă nâimporte quelle place, remplaçable par nâimporte qui. Et puis, il y a ceux qui trompent avec perversion : la femme est un objet que lâon consomme, et peu importe ce quâelle pense. A lâoccasion dâune tromp
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